Archives de catégorie : Discophilia. Les chroniques de Jean-Charles Hoffelé

Jean-Charles Hoffelé nous raconte ses écoutes, ses coups de coeur, ses déambulations dans la grande histoire de l’enregistrement du disque classique

L’œuvre au noir

Deux violonistes hantèrent le Premier Concerto de Chostakovitch, David Oistrakh et Leonid Kogan. Le premier y conduisait une réflexion quasi philosophique, y chantait une prière dans la nuit dont Chostakovitch aimait les inflexions juives, le ton biblique dont le grand Nocturne se trouvait saturé. Leonid Kogan jouait âpre Continuer la lecture de L’œuvre au noir

Sonates sérieuses

Un violoncelle ? Un baryton. Daniel Müller-Schott chante dès l’Allegro non troppo de la Sonate en mi mineur, ce psaume que Brahms semble avoir écrit d’un seul trait. Ce n’est pas du violoncelle qu’il joue, mais comme au travers de sa grande caisse le chant du baryton ardent et sombre des Quatre chants sérieux ou celui du Requiem allemand. Et si ces Sonates portaient elles aussi la parole de l’Ecclésiaste ?

Ces deux opus, beaux comme des promenades d’automne, auront souvent montré seulement leurs décors, le piano peignant les arrière-plans. Or, Francesco Piemontesi parle ici autant que Daniel Müller-Schott, chante avec lui, cette manière s’était un peu perdue depuis le temps des grands anciens, les deux Rudolf, Firkušný, Serkin surtout. Seul, plus près de nous, Michel Dalberto avait retrouvé cette présence pour un de ses disques les moins connus. Le ton est encore plus ardent dans le fa majeur de la Deuxième Sonate dont l’appassionato fulgure, déclame, vraie parole qui flamboie par-delà la mélodie même, et la pure beauté de tout cela, les inflexions, les replis, les grondements, les foucades du piano saisissent cette partition tempétueuse.

Entre ces deux mondes, un troisième, soudain délivré de toute gravité : les paysages arcadiens de la Sonate pour violon en sol majeur virent au ré dans l’archet lyrique de Daniel Müller-Schott, le piano de Francesco Piemontesi se fait orchestre, et cette échappée belle prodigieuse me fait regretter que les deux amis n’aient pas complété leur album avec les deux autres sonates de violon et quelques Lieder. Demain peut-être ?

LE DISQUE DU JOUR


Johannes Brahms
(1833-1897)
Sonate pour violoncelle et piano No. 1 en mi mineur,
Op. 38

Sonate pour violon et piano No. 1 en ré majeur, Op. 78 « Regen » (arr. pour violoncelle : Müller-Schott)
Sonate pour violoncelle et piano No. 2 en fa majeur,
Op. 99

Daniel Müller-Schott, violoncelle
Francesco Piemontesi, piano

Un album du label Orfeo C979201
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Photo à la une : le violoncelliste Daniel Müller-Schott – Photo : © DR

Grand Fauré

La première page de la Ballade m’a cueilli à froid : ce chant non legato à la main droite, qui espère trouver la grande ligne vocale dans le balancement de barcarolle de la main gauche, m’a rebuté, où avais-je fourré la partition ?, qui avait raison ?, mon souvenir de tant d’interprètes de Fauré qui liaient, ou Fauré lui-même ? Continuer la lecture de Grand Fauré

Classicisme

Samson François, abordant pour le seul disque l’intégrale de l’œuvre pour piano de Maurice Ravel en la voyant sous le prisme unique du Concerto pour la main gauche, en changea radicalement le ton : fantasque, étrange, morbide.

C’était aller à rebours du classicisme instauré par deux pianistes de première force Continuer la lecture de Classicisme