Quatuor absolu quarante années durant sur la scène internationale, artistes phares du catalogue Deutsche Grammophon à son apogée, les Amadeus auront laissé une discographie pléthorique. Pourtant, le studio de DGG, ses prises de son fastueuses et habiles Continuer la lecture de La vérité sur les Amadeus
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Discours du Prince
En musardant dans le 5e volume de cette patiente intégrale – ou anthologie, je ne sais plus trop quel est le souhait final de Pierre Hantaï – d’où me vient le sentiment que l’ombre de Gustav Leonhardt s’y profile plus qu’en aucun des précédents ? Ombre projetée par un vaste soleil, cela va sans dire.
Car si la danse est toujours aussi présente, elle se stylise, s’épure, Pierre Hantaï écoutant plus l’harmonie, stupéfiante, que le mouvement impérieux : les lignes chantent, l’espace du clavecin s’ouvre, plus vaste, plus audacieux, et lorsque il fait résonner le thème des Cyclopes de Rameau dont Scarlatti fit son miel pour le quasi fandango de la Sonate K. 475, c’est tout l’univers des claviéristes européens qui prend forme, comme précipité dans la langue scarlattienne qui les résumerait tous, de Bach à Rameau, en de fulgurantes ellipses.
Stupéfiant portrait d’une œuvre démiurgique qui juge et jauge ses contemporains mais aussi l’histoire de l’instrument, que le claveciniste français anime avec sa verve coutumière, son sens des couleurs qu’il jette à foison, surtout cette volonté de tout exposer du texte, ce qui chez Scarlatti exalte l’incroyable modernité d’une syntaxe que les Espagnols feront perdurer sans jamais pouvoir en retrouver le génie si libre, si altier.
Il faut dire que le si rayonnant clavecin conçu en 2004 par Jonte Knif d’après des instruments allemands du XVIIIe siècle est en soi une invention sonore dont les timbres, le clavier chantant, l’ampleur rayonnante s’accordent parfaitement à l’univers de Scarlatti, c’est aussi l’intelligence du programme qui fait tout le prix de ce nouveau volume, où alternent sur un plan savamment agencé par concordance de tonalités des sonates courues et d’autres moins jouées qui sont toujours de singulières découvertes, surtout modelées ainsi dans toute leur densité de rythmes et d’épices harmoniques. Vite, la suite.
LE DISQUE DU JOUR
Domenico Scarlatti (1685-1757)
Sonates, Vol. 5
Sonate pour clavier en si bémol majeur, K. 551
Sonates pour clavier en mi bémol majeur, K. 474, 475, 252 & 253
Sonates pour clavier en sol majeur, K. 547 & 124
Sonate pour clavier en si mineur, K. 87
Sonate pour clavier en mi majeur, K. 28
Sonate pour clavier en la majeur, K. 211
Sonates pour clavier en ré majeur, K. 401, 388 & 277
Sonate pour clavier en ut majeur, K. 157
Sonate pour clavier en fa mineur, K. 238
Sonate pour clavier en fa majeur, K. 205
Pierre Hantaï, clavecin
Un album du label Mirare MIR326
Acheter l’album sur le site du label Mirare ou sur Amazon.fr – Télécharger ou écouter l’album en haute-définition sur Qobuz.com
Photo à la une : © Jean-Baptiste Millot
Le rêve de Meyerbeer
Je crois que le projet a fait long feu. Signant chez EMI (devenu Warner/Erato), Diana Damrau avait mis une condition à l’exclusivité : qu’elle put graver tout un récital Meyerbeer, ce qui, de mémoire de discophile Continuer la lecture de Le rêve de Meyerbeer
Contraste
La grande Sonate que Tchaïkovski acheva en avril 1878 souffre d’un premier mouvement plein d’effets de marche qui souvent sonne(nt) creux. Sviatoslav Richter y peignait un orchestre Continuer la lecture de Contraste
La voix du rêve
Sena Jurinac fut d’abord de fabuleux personnages d’opéra, de Chérubin à Desdemona en passant par Fordiligi ou La Maréchale même si elle restera toujours pour moi Cherubino. Si vivante en scène, avec ce chant où les mots sont toujours à fleur de lèvres, même lorsqu’elle s’adonnait au récital de lieder.
Le disque n’a guère documenté cette part de son art ; en son glorieux automne, BASF lui offrira tout un récital Brahms dont l’élan restait magnifique, Fritz Busch lui fera enregistrer très tôt les Vier letzte Lieder, version où même le soleil a des ombres, inoubliable, mais la perle absolue est ce doublé Schumann pour les micros de Westminster en juin 1954.
Le piano modeste de Franz Holetschek s’accorde au fond parfaitement à l’humilité de ce Frauenliebe und -leben qui n’est qu’une prière fervente, moins peut-être au ton visionnaire, au théâtre qu’elle convoque dans le Liederkreis Op. 39, cette Lorelei, ce Clair de lune ne s’oublient plus une fois entendus, perfection du mot dans la note, transparence de l’émotion, et cette voix du bon Dieu, si longue dans son ambre.
Retrouver tout cela, réédité avec art d’après un très bon microsillon – le tirage du disque Westminster qui ajoutait les magies du Tramonto respighien ne s’est que très fugitivement trouvé et sonnait un rien sec (bien que disponible maintenant au téléchargement) – est une aubaine. Si vous ne connaissez pas ce diamant, courrez-y !
LE DISQUE DU JOUR
Robert Schumann (1810-1856)
Frauenliebe und -leben, Op. 42
Liederkreis, Op. 39
Sena Jurinac, soprano
Franz Holetschek, piano
Un album du label Hännssler/Profil PH17042
Acheter l’album sur le site www.uvmdistribution.com, ou sur Amazon.fr
Photo à la une : © DR