Archives par mot-clé : Elisabeth Leonskaja

Les La mineur

Les esprits chagrins maugréent devant le couplage classique des deux concertos romantiques en la mineur, pour moi c’est une madeleine, Geza Anda, les Berliner Philharmoniker, Rafael Kubelik furent mes premiers et dans la mémoire de bien des discophiles, les deux opus sont devenus indissociables, l’un éclairant l’autre, disposés chacun à l’alpha et à l’oméga de l’apogée du Romantisme.

Elisabeth Leonskaja ne craint pas de les réunir à nouveau, les différenciant avec art malgré l’unité de style qu’elle y met. Son Schumann ne refuse pas les élans, et dans le corps des accords, dans ce grand piano passent plus d’une fois l’ombre, et surtout la plénitude de Brahms, dont elle fut au sommet de son art une interprète majeure des Concertos. Grand jeu, grand style, sans une once d’atermoiement, mais avec un lyrisme qui s’affirme dans une cadence d’une maîtrise bluffante. Les Lucernois sont à son diapason, épiques, concentrés, mariant idéalement leurs timbres sombres à ceux si boisés d’un admirable piano hélas non documenté.

Pas un gramme de sentiment dans le Grieg, que tant auront pris en dessous de son espressivo empli de paysages, n’y entendant pas la grande ballade épique que la pianiste y magnifie dans l’ampleur de ses phrasés, le jeu altier, une sorte de sévérité sans raideur qui fait chanter l’Allegro molto de l’intérieur et donnera au Finale son ton de grand caprice un peu fantasque, sans jamais que rien n’y racole, d’autant que les timbres opulents des souffleurs et le geste sans rubato du chef le font avancer droit.

Le plus beau moment du disque ? L’Adagio du Grieg, rêve éveillé d’une limpidité hypnotique, où tout l’art de cette pianiste pour les pianistes paraît.

LE DISQUE DU JOUR

Robert Schumann
(1810-1856)
Concerto pour piano et orchestre en la mineur, Op. 54
Edvard Grieg (1843-1907)
Concerto pour piano et orchestre en la mineur, Op. 16

Elisabeth Leonskaja, piano
Luzerner Sinfonieorchester
Michael Sanderling, direction

Un album du label Warner 5954197837838
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Photo à la une : la pianiste Elisabeth Leonskaja – Photo : © Marco Borggreve

Les deux mondes

Marjana Lipovšek, diva des scènes lyriques, fut un peu à la manière des anciens monstres sacrés – je pense à Jennie Tourel, Mascia Predit – une récitaliste impénitente. Moins polyglotte que Tourel, elle était chez elle à égale aisance dans les langues de Goethe Continuer la lecture de Les deux mondes

Tropisme Russe

Johannes Moser, dont quelques disques ont déjà célébré la lyrique discrète, serait-il parvenu à libérer son art ? Porté par le Steinway orchestre d’Andrei Korobeinikov qui réalise ici la plus éloquente partie de piano de la Sonate de Rachmaninov jamais enregistrée depuis celle qu’Elisabeth Leonskaja offrait à Heinrich Schiff, son archet se déploie enfin, chantant sans retenue, avec quelque chose de déchirant même dans les batteries du Scherzando. Continuer la lecture de Tropisme Russe