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Paysages et contes

Surprise !, l’orchestre ne manque pas à la Suite Holberg, Andrey Gugnin l’imaginant du clavier alerte de son beau Bechstein, faisant surgir autant de personnages que de paysages, vraie musique de scène pour dix doigts.

Ce que tant de pianiste refusent à Grieg, le génie de la narration, le cantonnant aux vertus illustratives d’un aquarelliste, Gugnin le possède à un degré singulier. C’est ce qui rend les deux cahiers de Pièces Lyriques si émouvants sous ses doigts : écoutez le petit ballet de la Sylfide, ses entrechats mystérieux, l’estompe jamais aussi debussyste de Phantom : quel Septième Cahier !

Tant de raffinement culminera dans l’Erotikon du Troisième Cahier, mais Andrey Gugnin emploiera également toute sa science pianistique aux variations de la Ballade, cahier majeur de la littérature pianistique romantique, qu’il joue en en accroissant les mystères.

Disque magique, peut-être le plus beau de ce pianiste qui ne laisse jamais de me surprendre ; il ne doit pas en rester là chez Grieg : la Sonate, d’autres cahiers des Pièces Lyriques veulent son art.

LE DISQUE DU JOUR

Edvard Grieg (1843-1907)
Holberg Suite, Op. 40 (version pour piano seul)
Pièces lyriques, Volume VII, Op. 62
Ballade en forme de variations sur un thème populaire norvégien, Op. 24
Pièces lyriques, Volume III, Op. 43

Andrey Gugnin, piano

Un album du label Hypérion Records CDA68424
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Photo à la une : le pianiste Andrey Gugnin – Photo : © Boris Scitar

Plus de lumière

Le titre du papier ne veut pas paraphraser Goethe, dont le « Mehr Licht » avait une portée métaphysique. Chez Neville Marriner la lumière était à la fois une philosophie – rendre tout le texte et rien que le texte – et une politesse : faire tout sonore et accessible, aux auditeurs de ses concerts comme à ceux de ses disques Continuer la lecture de Plus de lumière

Les La mineur

Les esprits chagrins maugréent devant le couplage classique des deux concertos romantiques en la mineur, pour moi c’est une madeleine, Geza Anda, les Berliner Philharmoniker, Rafael Kubelik furent mes premiers et dans la mémoire de bien des discophiles, les deux opus sont devenus indissociables, l’un éclairant l’autre, disposés chacun à l’alpha et à l’oméga de l’apogée du Romantisme.

Elisabeth Leonskaja ne craint pas de les réunir à nouveau, les différenciant avec art malgré l’unité de style qu’elle y met. Son Schumann ne refuse pas les élans, et dans le corps des accords, dans ce grand piano passent plus d’une fois l’ombre, et surtout la plénitude de Brahms, dont elle fut au sommet de son art une interprète majeure des Concertos. Grand jeu, grand style, sans une once d’atermoiement, mais avec un lyrisme qui s’affirme dans une cadence d’une maîtrise bluffante. Les Lucernois sont à son diapason, épiques, concentrés, mariant idéalement leurs timbres sombres à ceux si boisés d’un admirable piano hélas non documenté.

Pas un gramme de sentiment dans le Grieg, que tant auront pris en dessous de son espressivo empli de paysages, n’y entendant pas la grande ballade épique que la pianiste y magnifie dans l’ampleur de ses phrasés, le jeu altier, une sorte de sévérité sans raideur qui fait chanter l’Allegro molto de l’intérieur et donnera au Finale son ton de grand caprice un peu fantasque, sans jamais que rien n’y racole, d’autant que les timbres opulents des souffleurs et le geste sans rubato du chef le font avancer droit.

Le plus beau moment du disque ? L’Adagio du Grieg, rêve éveillé d’une limpidité hypnotique, où tout l’art de cette pianiste pour les pianistes paraît.

LE DISQUE DU JOUR

Robert Schumann
(1810-1856)
Concerto pour piano et orchestre en la mineur, Op. 54
Edvard Grieg (1843-1907)
Concerto pour piano et orchestre en la mineur, Op. 16

Elisabeth Leonskaja, piano
Luzerner Sinfonieorchester
Michael Sanderling, direction

Un album du label Warner 5954197837838
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Photo à la une : la pianiste Elisabeth Leonskaja – Photo : © Marco Borggreve