Adéquation

L’estompe qui fait retourner au silence l’Allegro de la Sonate en la majeur, quelle pure poésie sous les doigts d’Adam Laloum. Le dolce résigné de l’Andantino qu’ouvre le pas esseulé du Wanderer sera dans le même nimbe sonore, piano d’ondes que n’eut pas désavoué Radu Lupu. L’hallucination paraîtra d’autant plus saisissante, une vision commencée dans un rêve qui se fera cauchemar jusqu’à cette rupture, puis le dolce à nouveau, mais amer. Es ist vollbracht.

Comment faire après pour le salon du Scherzo ? Ce sera une échappée belle, suprêmement jouée en doigts plus souriants que rieurs, en rythmes juste cambrés, qui montrent à quel point la grammaire de Schubert tombe recta dans le vocabulaire expressif du jeune pianiste. Le trio fera un aparté étrange, avec ses suspensions, ses questions sans réponse. La mort s’invite au bal ? Qui sait. L’Allegro sera moins souriant au retour.

Merveilleux Finale, pris dans le chant et la couleur même de la Taubenpost du Schwanengesang, si ce n’est pas d’un pur schubertien, cette tendresse… !

Et les Moments musicaux ? Dès l’appel du cor le ton est donné, musique de plein air, mais de plein air nocturne. Un Leiermann s’invite dans l’Andantino, on voit le postillon de l’Allegro moderato, le rouet du Moderato dévide une nostalgie un peu amère avant que n’éclate la proclamation très Atlas de l’Allegro vivace. La romance perdue, sans fin, de l’Allegretto, est à pleurer. Comment Adam Laloum a-t-il su la faire venir d’un autre monde ? Décidément, il s’est trouvé en Schubert…

LE DISQUE DU JOUR

Franz Schubert (1797-1828)
Sonate pour piano No. 20
en la majeur, D. 959

6 Moments musicaux,
D. 780

Adam Laloum, piano

Un album du label harmonia mundi HMM902386
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Photo à la une : le pianiste Adam Laloum – Photo : © Harald Hoffmann