Grand Chœur

Emmanuelle Haïm aura assemblé un vaste chœur et un orchestre à ses dimensions pour le concert donné avec son Concert d’Astrée dans la Chapelle Royale du Château de Versailles le 20 novembre 2019.

Saisissant dès l’entrée du Requiem de Campra par l’ampleur des phrasés, la profondeur de la sonorité, cette moire prend singulièrement la lumière rappelant qu’ici le Dies Irae sera évité : messe pour la rédemption, l’absolution, qui promet dans son faste hautain, où passent des harmonies lullystes, un paradis certain.

La forme est superbe, le discours s’y accorde, Campra ayant soigné autant ses solos que l’écriture expressive du chœur et réservant les fastes d’une écriture savante aux ensembles : le Domine Jesus Christus, ténébreux, intense, est une page qui pourrait venir d’un enfer d’opéra.

Cette bascule vers une scène du sacré se réalise à plein avec les deux Grands Motets qui constituaient la seconde partie du concert. Mondonville ouvrant la Mer Rouge devant le peuple d’Israël, quel geste, quel aplomb, quelle superbe, si ce n’est pas un théâtre qui impose l’opéra devant l’autel dans le halètement de stupeur du chœur ! Emmanuelle Haïm y fait la tempête visible avant même d’être audible, comprenant tout de cette musique de l’œil, et quelle puissance dans le grand récit du haute-contre sur le décor des basses et des bassons (admirable Samuel Boden), triomphant d’une écriture aussi fleurie que dangereuse.

Chez elle chez Rameau, Emmanuelle Haïm met une folle animation à In convertendo Dominus (écoutez l’enthousiasme au long du Tunc repletum est), laissant espérer qu’un jour prochain, avec sa belle bande, elle les gravera tous, et qu’elle reviendra aussi au puissant théâtre de Mondonville.

LE DISQUE DU JOUR

André Campra (1660-1744)
Messe de Requiem
Jean-Philippe Rameau (1683-1764)
In convertendo Dominus,
RCT 14

Jean-Joseph Cassanéa de Mondonville (1711-1772)
In Exitu Israel

Marie Perbost, soprano (premier dessus)
Emmanuelle Ifrah, soprano (second dessus) [uniquement Campra]
Samuel Boden, haute-contre (ténor)
Zachary Wilder, taille (ténor) [uniquement Campra]
Victor Sicard, basse-taille (baryton)

Le Concert d’Astrée
Emmanuelle Haïm, direction

Un album de 2 CD du label Erato 5054197504686
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Photo à la une : la cheffe Emmanuelle Haïm –
Photo : © Marianne Rosenstiehl