Une ode, une sérénade ? Le poème de Milton aura fait échapper cette partition singulière à toute classification. Haendel résiste à la traiter en oratorio, se régalant du texte de Charles Jennens et composant une partition aussi brillante qu’ambigüe, conçue durant le glacial hiver de 1739–1740.
Formidable peinture des caractères humains comme de la Nature, musique de l’œil autant que de l’oreille dont William Christie se saisit d’un geste léger, éclairant tout, allégeant le discours, le faisant en apparence très sérénade pour faire mieux paraître ce que peu auront su y voir en filigrane : un hommage masqué au monde de Purcell, à ses masques, à son théâtre de poche.
On trouvera ailleurs des équipes de chant plus brillantes (écoutez le Sweet bird de Lorna Anderson chez Robert King), mais un tel esprit, un façon si émouvante de conduire l’œuvre à son point de bascule exact, entre divertissement et philosophie, dit tout de la partition et dévoile un splendide « boy soprano » échappé du Trinity College : écoutez « Come, but keep thy wonted state », ce charme fragile et puissant à la fois ne s’oublie plus.
LE DISQUE DU JOUR
Georg Friedrich Haendel (1685-1759)
L’Allegro, il Penseroso ed il Moderato, HWV 55
Rachel Redmond, soprano
Leo Jemison, soprano garçon (du “Trinity Boys Choir”)
James Way, ténor
Sreten Manojlović,
baryton-basse
Les Arts Florissants
William Christie, direction
Un album de 2 CDs du label harmonia mundi HAF 89052359.60
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Photo à la une : le chef William Christie – Photo : © DR