Tous les articles par Jean-Charles Hoffelé

Pour l’amour d’Yvonne

En octobre 1974, Yvonne Lefébure retournait au studio d’enregistrement. François Carbou lui avait proposé d’enregistrer trois Sonatines de Maurice Emmanuel. Emmanuel avait été son maître, elle se sentait le devoir d’honorer sa mémoire Continuer la lecture de Pour l’amour d’Yvonne

Vainqueur

28 mai 2016, le public et le jury du Concours Reine Elisabeth couvraient sous des tonnerres d’applaudissements, Lukáš Vondráček, vingt-neuf ans. Il venait de ne faire qu’une bouchée du Troisième Concerto de Rachmaninov. Vous pourrez entendre, en ouverture du coffret documentant l’édition 2016, ce Troisième tout en panache, aussi héroïque que virtuose, qui chante avec une sorte de pureté irrésistible. Continuer la lecture de Vainqueur

Fantaisie de jeune homme

Un disque Schumann regroupant les contes et les pièces de fantaisie dans leurs vêtures pour alto et piano m’avait alerté : portant le bel instrument d’Adrien Boisseau, un piano élégant et diseur apparaissait, décidément très schumannien de timbres, d’accents, celui de Gaspard Dehaene (un CD Oehms Classics, OC1819, Discophilia vous en avait causé). Continuer la lecture de Fantaisie de jeune homme

Les progressistes

Schoenberg vouait un culte aux œuvres de Brahms : derrière la maîtrise formelle et le langage déjà postromantique, il saisissait la musique d’un autre temps, le sien justement. Ce n’est donc pas à partir de rien que Vincent Larderet marie sur le même album la symphonie de piano de la 3e Sonate, les Intermezzi Op. 117 et la Sonate de Berg. On pourrait rêver d’un second disque mariant les Opus 118 et 119 de Brahms avec les Klavierstücke Op. 11, 19 et 23 de Schoenberg où le propos serait en quelque sorte parfait.

Mais plutôt que la confrontation formelle, il a choisi d’exposer la persistance lyrique entre l’univers de Brahms et celui de Berg. Lyrique, sa Troisième Sonate l’est assurément, sans perdre pour autant les carrures marquées, le jeu orchestral, la volonté d’espace qui charpentent un Allegro vraiment maestoso.

Cette ampleur, ce ton affirmé font le souple nocturne de l’Andante espressivo d’autant plus étonnant : il avance, très libre de conduction, lumineux dans cette nuit de demi-lune, dit plutôt que chanté. C’est faire entendre le sous-texte que Brahms y glisse, une vraie supplique amoureuse. Scherzo en armure, impérieux, d’où se libère un Rückblick plus affirmatif qu’interrogatif, beethovénien, au contraire du Finale dont Larderet ne cache rien des complexités, assumant son agogique fantasque, ce fameux Allegro moderato ma rubato sur lequel tant de pianistes passent allégrement, occupés de tenir la ligne, incapables de voir les paysages.

Décidément la Troisième Sonate a de la chance au disque en ce moment, après celle si envoûtante de Gabriele Carcano, Vincent Larderet en modèle une toute autre vision. L’art du pianiste français se libère plus encore dans les trois Intermezzi de l’Op. 117, disant les contrechants, animant l’espace plutôt que le lissant dans le sfumato, usant de la sonorité naturelle de son très beau Steinway.

La Sonate de Berg peut paraître, son premier motif désarmant caressant la nostalgie. Une tristesse s’installe, qui ne se résoudra pas, quelque chose de vainement tendu me rappelle la manière si singulière qu’y mettait Maria Yudina. Ce n’est pas rien.

LE DISQUE DU JOUR

Cvr Brahms Larderet BergJohannes Brahms (1833-1897)
Sonate pour piano No. 3
en fa mineur, Op. 5

3 Intermezzi, Op. 117
Alban Berg (1885-1935)
Sonate pour piano, Op. 1

Vincent Larderet, piano

Un album du label Ars Produktion ARS 38 217
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Photo à la une : © Martin Teschner