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Divine simplicité

Deux Concertos de Mozart par un jeune pianiste tchèque adoubé par Alfred Brendel, cela s’écoute avec attention d’autant qu’il semble bien que ce soit son premier disque en tant que soliste. La sonorité est si belle, si équilibrée, tout y chante d’évidence ; immédiatement je sais, à un phrasé, à un accent à peine suggéré, qu’il est un mozartien de pure race, avec un sens des proportions et du discours que viennent renforcer une absence d’affectation, un dédain des charmes dont le 20e Concerto profite à plein, ombreux comme il peut l’être.

Jiří Bělohlávek l’y accompagnait d’un geste ample mais ferme en ce 1er mai 2013, on est au concert, comme on l’est également pour le 12e Concerto, enregistré avec les membres du Quatuor Doležal dans sa vêture de chambre ; sans les bois, sans l’orchestre, c’est une toute autre partition qu’anime le pianiste tchèque, qui laisse voir à nu l’architecture, les sentiments absolument intimes, quelque chose de mélancolique qui ne sonne pas à ce point dans l’habillage pour le concert.

Cette mise en regard entre un Concerto de la maturité et un ouvrage plus « jeune » en effectif allégé ne cesse de m’interroger. Jan Bartoš poursuivra-t-il cette étrange juxtaposition en d’autres volumes ? En tous cas, découvrez cet artiste.

LE DISQUE DU JOUR

Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
Concerto pour piano No. 12 en la majeur, KV 414 (version de chambre)
Concerto pour piano No. 20 en ré mineur, KV 466

Jan Bartoš, piano
Quatuor Doležal
Orchestre Philharmonique Tchèque
Jiří Bělohlávek, direction

Un album du label Supraphon SU4234-2
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Photo à la une : © Marek Bouda

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Correspondances

La belle idée, et qui ne s’est guère courue au disque ; mettre en regard Debussy et Szymanowski avec le prétexte des Masques de chacun. Ceux de Debussy viennent de Fragonard, de Watteau mais aussi d’un certaine Italie, ils ont un ton de fêtes galantes, des ivresses de carnaval ; ceux de Szymanowski sont des portrait voluptueux ou cruels où le compositeur d’Harnasie raffine son écriture de clavier jusqu’à la rendre impossible : on y trouve certaines des choses les plus difficiles à jouer mais aussi à comprendre du répertoire pianistique du XXe siècle, Sviatoslav Richter en était fasciné, y voyait des correspondances avec le Ravel des Miroirs et de Gaspard de la nuit.

Cathy Krier les joue à la pointe sèche éclairant les rythmes complexes, les harmonies astringentes, mais elle parvient aussi à faire paraître des personnages : on voit Shéhérazade (un peu Lorelei quand même, on perçoit en effet le parallèle possible entre Tantris et Alborada (ils sont strictement contemporains), et la Sérénade de Don Juan est emmenée avec aplomb. Quelle pianiste que cette jeune femme qui n’a peur de rien et compose toujours ses disques avec une telle acuité.

Même si j’aurais bien suivi Richter dans son idée de confronter le Polonais avec le Basque, je me laisse emporter par les deux Livres d’Images tels qu’elle les anime, clavier léger ou tout se reflète, éminemment debussyste même dans ces transparences qui font tout entendre sans que le mystère ne se dissolve. Et pour Masques, c’est l’ivresse pure et avec un chic !

Osera-t-elle le face-à-face des Miroirs et des Métopes ?

LE DISQUE DU JOUR

Claude Debussy (1862-1918)
Images, Livre I, L. 110
Images, Livre II, L. 111
Masques, L. 105
Karol Szymanowski
(1882-1937)
Masques, Op. 34

Cathy Krier, piano

Un album du label Cavi-Music LC15080
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Photo à la une : © DR

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