Impossible d’entendre dans la Sonate composée a minima par un gamin de treize ans quoi que ce soit du vocabulaire de César Franck. Son classicisme scolaire, son formalisme pointent tout de même cette distance avec le Romantisme Continuer la lecture de Les deux César
Tous les articles par Jean-Charles Hoffelé
L’autre Silla
Singulier Silla ! Un monarque éclairé écrivant un livret sur un dictateur romain, qui pouvait l’oser sinon Frédéric II ? Le souverain, qui s’était lié d’une amitié pas toujours sans ombre avec le musicien, n’ira pas jusqu’à écrire chaque mot, d’ailleurs Graun voulait un opéra tout italien, de musique et de verbe. Frédéric II, comme à son habitude, écrira donc en français, charge au librettiste de la cour, Giovanni Pietro Tagliazucchi, de le traduire et de l’augmenter dans la langue du Dante.
En 1753, Graun en était à son vingtième opéra, et avait atteint la pleine maturité de son art, orchestrations brillantes qui rappellent le théâtre vénitien, génie mélodique qui pourra soutenir la comparaison avec celui de Haendel, écriture virtuose aux pyrotechnies éblouissantes pour satisfaire la brillante assemblée de castrats en troupe à l’Opéra de Berlin, surtout une intensité dramatique qui ne laisse pas une minute de repos au spectateur comme à l’auditeur. Ce Silla venu dix-neuf ans avant celui du jeune Mozart est un vrai drame en musique qui bouscule les canons de l’opera seria.
Succès absolu chez le public des représentations comme chez les connaisseurs : Frédéric II, qui confessait préférer souvent les opéras de Hasse à ceux de Graun, rendit les armes. Ce bouillonnant Silla était bien un chef-d’œuvre que le Festival d’Innsbruck a bien eu raison de ressusciter. Il s’en est d’ailleurs donné les moyens, assemblant une distribution fabuleuse, dominée par le Silla de Bejun Mehta (écoutez son air à la fin de l’Acte I, cet art si prégnant ne s’oublie pas). Face à lui, aucun ne démérite, du Metello de Valer Sabadus, au Postumio du jeune Samuel Mariño, incroyable sopraniste.
Paradoxe, si les falsettistes triomphent des écritures fastueuses que leur aura destinées Graun, le soprano de Roberta Invernizzi souffre un peu face à la tessiture élevée de Fulvia, seul bémol de ce brillant revival qu’Alessandro de Marchi anime avec feu et lyrisme. Puisse une aussi brillante bande poursuivre chez Graun, et oser aussi regarder du coté de Hasse.
LE DISQUE DU JOUR
Carl Heinrich Graun
(1704-1759)
Silla
Bejun Mehta, contre-ténor (Silla)
Valer Sabadus, contre-ténor (Metello)
Hagen Matzeit, contre-
ténor (Lentulo)
Samuel Mariño, contre-ténor (Postumio)
Eleonora Bellocci, soprano (Octavie)
Roberta Invernizzi, soprano (Fulvia)
Mert Süngu, ténor (Crisogono)
Coro Maghini
Innsbrucker Festwochenorchester
Alessandro De Marchi, direction
Un coffret de 3 CD du label CPO 555586-2
Acheter l’album sur le site du label www.jpc.de, sur le site www.clicmusique.com, ou sur Amazon.fr – Télécharger ou écouter l’album en haute-d finition sur Presto Music
Photo à la une : © DR
Tout Alfred
Le grand coffret tout Cortot paru voici dix ans avait disparu, mangé de bon appétit par les discophiles. Pour ceux alors encore en culottes courtes, ou désargentés, Warner Classics remet la somme sur le marché Continuer la lecture de Tout Alfred
Terre et Ciel
« Naturlaut », c’est ce que voulait faire entendre Gustav Mahler dans les premières pages de sa Première Symphonie, les bruits de sa nature d’enfance, avec l’écho lointain des fanfares de la garnison proche. Un ländler piqué d’un chant de coucou suivra, Semyon Bychkov le file avec une douceur irréelle Continuer la lecture de Terre et Ciel
Le faux Polydore
Stuck, cet autre Florentin de Paris, sera passé à une relative postérité grâce à ses Cantates célébrant l’acmé d’un genre tout français. On aura trop longtemps ignoré que son génie fut d’abord pour la scène lyrique. Polydore fut son chef-d’œuvre justement fêté et repris Continuer la lecture de Le faux Polydore