Kaddish

Un berceau de cordes ouvre dans un grand geste la vaste prière pour les morts juifs des deux holocaustes, celui d’Hitler et celui de Staline, qu’est la 21e Symphonie de Mieczysław Weinberg, partition au noir dont l’ampleur aura fait dire à Gidon Kremer qu’il avait, en lisant la partition, le sentiment de découvrir la Onzième Symphonie de Gustav Mahler.

Ce deuil ne veut pas de voix, la musique est le langage de l’indicible, son prophète est ici un violon, un seul violon, l’instrument immémorial du peuple ashkénaze, que Gidon Kremer joue en déploration. Le Largo qui ouvre l’œuvre cite à nue sur un piano solitaire, un fragment de la Première Ballade de Chopin, bref tombeau de cette Pologne disparue qui fut toujours la vraie patrie du compositeur, exilé dans cette Union Soviétique qui aura dépecé avec l’aigle nazi son pays et sa famille.

Mais Gidon Kremer a raison, Mahler est omniprésent tout au long de l’œuvre, en citation directe, mais surtout par le ton général même lorsque celui-ci reparaît derrière le masque de Chostakovitch dans les deux brefs scherzos en forme de danses de mort.

Mirga Gražinytė-Tyla vous conduit dans cet enfer sans paradis avec le même art souverain qu’elle met aux grands panneaux du triptyque de la Deuxième Symphonie, retable de cordes en deuil composé au sortir de la Seconde Guerre mondiale. Mettre en regard ces deux Requiem était une évidence.

LE DISQUE DU JOUR

Mieczyslaw Weinberg (1919-1996)
Symphonie No. 2 pour cordes, Op. 30
Symphonie No. 21, Op. 152 “Kaddish”

Gidon Kremer, violon
Kremerata Baltica
City of Birmingham Symphony Orchestra
Mirga Gražinytė-Tyla, direction

Un album de 2 CD du label Deutsche Grammophon 4836566
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Photo à la une : le chef d’orchestre Mirga Gražinytė-Tyla – Photo : © Deutsche Grammophon