Lumière

Le grand piano qu’exige la Troisième Sonate de Brahms saurait-il se plier au pianoforte que jouait Mozart ? N’ayez pas peur ! Jonathan Fournel n’aura pas tenté, se perdant et même plutôt se trouvant dans le paradis mozartien, de toucher un Stein, pas même de l’évoquer jouant, je suppose, un très beau Bösendorfer (pas précisément documenté) dont les registres égaux, l’aigu sans clairon, les basse légères, le medium assez cor de basset, l’aident à infuser dans le Concerto en si bémol majeur l’écho du chant de Barberine dont l’Andante propose comme un miroir.

Partout le toucher adamantin, les phrasés qui réussissent à la fois l’allusion et l’éloquence, la pesée exacte du tactus, et une lumière nostalgique singulière, j’oserais écrire « haskilienne », enchante ce 18e avec cette alliance de fausse désinvolture et de vraie confidence qui lui aura manquée depuis Murray Perahia.

Et les grands décors du 21e, où il a le discernement de choisir les cadences de Dinu Lipatti ? Je salue l’éloquence sans tapage, le sourire si fin, l’allant de grand jardin qu’Howard Griffiths, le maître d’œuvre de cette série impeccable dont chaque volume me délecte, y imprime dès l’intrada, autorisant Jonathan Fournel à y chanter sans frein, avec les élans d’opéra qu’il y faut mettre dans les Allegros où il sait juste suggérer les ombres.

Le fameux Andante chantera aussi, et dira surtout, sans ce ploiement de tempo dont tant l’auront romantisé. Les sentiments sont fluides, le jeune homme qui se révèle ici chez Mozart le sait bien.

LE DISQUE DU JOUR

Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
Concerto pour piano et orchestre No. 18 en si bémol majeur, KV 456
Concerto pour piano et orchestre No. 21 en ut majeur, KV 467

Jonathan Fournel, piano
Mozarteumorchester Salzburg
Howard Griffiths, direction
Le 8è volume de la série « Next Generation Mozart Soloists »

Un album du label Alpha Classics 1039
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Photo à la une : le pianiste Jonathan Fournel –
Photo : © Marco Borggreve