Nelson vivant

Le titre est trompeur, de sessions pensées pour le disque et restées inédites, seules quatre pièces captées en 2014 et quatre autres à des dates différentes sont effectivement des inédits de studios Decca, avec au sommet une fabuleuse Plus que lente de Debussy, comme improvisée, et un très libre et émouvant Intermezzo en la majeur issu de l’Op. 118 de Brahms.

Le reste du double album, passionnant et indispensable à tout amoureux de l’art de Nelson Freire comme de l’histoire du piano enregistré, fait en réalité suite aux fameux « Radio Days » et le complète avec trois gravures concertantes majeures.

À Francfort, sous la battue implaccable de Michael Gielen, le Premier Concerto de Bartók montre le génie des timbres que savait déployer Nelson Freire, bruitiste, intrigant, d’une poésie surprenante et pour l’Andante pris lent le sentiment d’une musique rituelle infiniment mystérieuse avant un Final barbare assez fascinant. Une autre captation en concert, avec Pierre Boulez à Cleveland, mériterait elle aussi d’être publiée.

L’élégance atticiste du 4e de Beethoven sous la baguette inspirée du toujours parfait Uri Segal culmine dans la prière de l’Andante, la Burleske de Strauss ne le montre pas immédiatement libre et joueur, la direction de Zoltán Peskó, sans éclat n’y est pas pour peu, mais laissons-le se « chauffer », et écoutons un peu ce piano volatile, capricieux, mais toujours tenu et élégant.

Absolument fabuleux, un Deuxième de Brahms qui prend tous les risques, cravaché par Horst Stein capable de ce type de folie au concert, immense, irrésistible, et qui exige que Decca poursuive l’exhumation des trésors en concert laissés un peu partout autour de la planète par ce génie modeste qui nous manque tant.

LE DISQUE DU JOUR

Nelson Freire
Memories

The Unreleased Recordings, 1970-2019

Ludwig van Beethoven (1797-1827)
Andante favori, WoO 57
Concerto pour piano et orchestre No. 4 en sol majeur, Op. 58
Radio-Sinfonieorchester StuttgartUri Segal, direction
11 Bagatelles, Op. 119 (extrait : XI. Andante, ma non troppo)

Richard Strauss (1864-1949)
Burlesque en ré mineur, AV 85
SWR Sinfonie Orchester Baden-BadenZoltán Peskó, direction
Claude Debussy (1862-1918)
La plus que lente, L. 121
Heitor Villa-Lobos (1887-1959)
Bachianas Brasileiras No. 4, W. 264 (extrait : I. Prelúdio (Introdução)

Béla Bartók (1881-1945)
Concerto pour piano et orchestre No. 1, BB 91, Sz. 83
Orchestre Symphonique de la Radio de FrancfortMichael Gielen, direction
Johannes Brahms (1833-1897)
Concerto pour piano et orchestra No. 2 en si bemol majeur, Op. 83
Orchestre Symphonique de la Radio de FrancfortHorst Stein, direction
Intermezzo en la majeur, Op. 118 No. 2
+ Œuvres de Christoph Willibald Gluck et Johann Sebastian Bach

Nelson Freire, piano

Un album de 2 CD du label Decca 4853136
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Photo à la une : le pianiste Nelson Freire – © DR