Le piano au fond des bois

Programme tout Weber, piochant à l’orchestre, à l’opéra, un peu fourre-tout, et que Christoph Eschenbach dirige très sombre, ce qui va bien à la romance d’Ännchen au troisième Acte du Freischütz, qu’hélas Anna Prohaska dit plus qu’elle ne chante, avec quelle puissance dramatique cependant, mais comme j’aurai aimé que le chef se débride un peu dans le petit rondo du deuxième Acte où la soprano sonne bien sage.

Tant pis, l’intérêt du disque est ailleurs, pas dans les Ouvertures, un peu trop massives, mais dans un Konzertstück commencé dans une teinte nocturne quasi schumanienne, où Martin Helmchen entre mystérieusement pour faire chanter une romance recueillie, d’une poésie crépusculaire, et que quelques traits flûtés viennent dorer. La fantaisie s’installe, allusive et soudain étrange. Ce piano du fond des bois qui chante comme une soprano et distille un climat fébrile est inouï de puissance suggestive jusque dans ses pianissimos qui sondent le silence. La marche, le Finale seront solaires, changeant drastiquement le paysage, mais y conservant une dimension névrotique que l’œuvre n’aura guère connue sinon sous les doigts de Claudio Arrau.

LE DISQUE DU JOUR

Carl Maria von Weber (1786-1826)
Der Beherrscher der Geister, Op. 27, J. 122
Konzertstück pour piano et orchestre en fa mineur, Op. 79, J. 282
Der Freischütz, Op. 77, J. 277 (3 extraits : 1. Ouverture, 2. Romance, Recitativo e Aria « Einst träumte meiner sel‘gen Base », 3. Arietta « Kommt ein schlanker Bursch gegangen »)
Oberon, J. 306 – Ouverture

Martin Helmchen, piano
Anna Prohaska, soprano
Konzerthausorchester Berlin
Christoph Eschenbach, direction

Un album du label Alpha Classics 744
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Photo à la une : le chef d’orchestre Christoph Eschenbach – Photo : © DR