L’Envol

Un pianiste pour les poètes, et d’abord poète lui-même, voilà ce que fut d’emblée Martin Helmchen, jusqu’à une certaine discrétion qui à mesure se sera transformée en un chant profond, ardent, intense mais toujours bercé dans ce toucher exact, un rien dépouillé.

De récents Vingt Regards sur l’Enfant Jésus l’avaient pourtant prouvé : dans l’univers moderne qu’il goûte tant mais dont le disque l’avait tenu jusque-là éloigné, ce clavier pouvait tonner et foudroyer.

Aujourd’hui, c’est Beethoven qui lui fait prendre son plein envol. Il faut entendre comment dans l’orchestre sec et preste réglé façon historiquement informé par Andrew Manze, ce piano s’élance pour un Deuxième Concerto de Beethoven conquérant comme jamais depuis celui de Martha Argerich.

L’ardeur solaire, la jeunesse, la fougue, quelque chose d’absolument libre font cette lecture irrésistible, si bien que j’espère un Empereur tout aussi vif.

Mais non, Martin Helmchen prend soudain la distance qu’il faut, patine son clavier, élance les traits, et chante partout, cherchant à ombrer le discours. C’est d’une beauté folle, et d’une noblesse qui se passe de trompette tant le style classique, tenu, y est éclairé par un jeu quasi divinatoire.

Admirable premier volume d’une intégrale annoncée, dont on voudrait déjà tenir la suite.

LE DISQUE DU JOUR

Ludwig van Beethoven (1770-1827)
Concerto pour piano et orchestre No. 2 en si bémol majeur, Op. 19
Concerto pour piano et orchestre No. 5 en mi bémol majeur, Op. 73 « L’Empereur »

Martin Helmchen, piano
Deutsches Symphonie-Orchester Berlin
Andrew Manze, direction

Un album du label Alpha 555
Acheter l’album sur le site du label Alpha Classics ou sur Amazon.fr – Télécharger ou écouter l’album en haute-définition sur Qobuz.com

Photo à la une : le pianiste Martin Helmchen – Photo : © Giorgia Bertazzi