Foin des instruments anciens ! Après avoir été un des fers de lance du renouveau de l’interprétation du répertoire baroque sur un instrumentarium d’époque, Reinhard Goebel revendique haut et fort et même avec un brin de polémique son désir de diriger Bach et pour l’heure Haendel à la tête d’un orchestre d’instruments modernes.
Comment ne pas entendre dès la petite sérénade mélancolique des bois qui ouvre le Largo du Premier Concerto de l’Opus 3 que le ton, la manière, les phrasés, les appuis, sont restés strictement historiquement informés, mieux, que les couleurs elles-mêmes ne manquent pas, tant qu’on en reste aux souffleurs, car les cordes sont grises et pour tout dire font masse.
C’est l’écueil probable parfois, avéré ici, des Berliner Barock Solisten, mais Reinhard Goebel se rembourse de cet inconvénient en modelant une matière sonore si abondante : il sculpte avec un amour évident cet Opus 3 si génial – où Haendel invente un somptueux théâtre symphonique -, trop heureux d’avoir sous la main ce son ample, qu’il peut faire tonner et danser sans craindre qu’il se brise.
Les puristes hurleront, je préfère y entendre la réalisation pratique, et pour tout dire inévitable, du principal souhait de Goebel qui, contre toute une certaine approche éthérée prônée par les Hollandais, voulait faire rugir, danser, mais aussi rêver le baroque allemand. Et maintenant s’il vous plaît, l’Opus 6.
LE DISQUE DU JOUR
Georg Friedrich Haendel (1685-1759)
Concerto grosso No. 1 en si bémol majeur, BWV 312
Concerto grosso No. 2 en si bémol majeur, HWV 313
Concerto grosso No. 3 en sol majeur, HWV 314
Concerto grosso No. 4(a) en fa majeur, HWV 315
Concerto grosso No. 4(b) en fa majeur, HWV Ahn. B 319
Concerto grosso No. 5 en ré mineur, HWV 316
Concerto grosso No. 6 en ré majeur, HWV 317
Berliner Barock Solisten
Reinhard Goebel, direction
Un album du label Haenssler Classics CDHC19031
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Photo à la une : le violoniste et chef d’orchestre Reinhard Goebel – Photo : © Christina Bleier