Leur père à tous

Heino Eller, vous connaissez ? Un Concerto pour violon sombre et tempétueux, que Viktor Pikaïsen joua un temps m’avait tiré l’oreille. Quelle belle écriture, abrupte et soignée à la fois, j’y sentais l’empreinte d’un maître.

Voici que Baiba Skride l’enregistre, archet moins impérieux, mais plus de poésie, d’autant qu’Olari Elts, le nouveau petit génie de la direction balte, lui crée des paysages admirables.

La plus belle œuvre du disque en est le second opus, cette Légende symphonique à l’orchestre onirique, avec ses solos de violon et de violoncelle, ses concerts d’oiseaux tristes, ses horizons lacustres ou sylvestres, vingt-quatre minutes d’un éden orchestral qui serait la continuité des opus les plus magiques de Sibelius, une merveille dans laquelle je ne peux m’empêcher de venir rêver.

Dans les années vingt, Heino Eller fut vraiment l’un des génies de la musique balte, la Deuxième Symphonie plus âpre, plus sèche, datée de 1947 n’a pas la même puissance évocatrice, mais elle témoigne de ce chemin vers la modernité que le compositeur effectua en partie pour ses élèves : avec Eduard Tubin, il fut le père de la musique estonienne, celui qui guidera, entre tant d’autres élèves, Arvo Pärt.

Après cette splendeur de Légende symphonique, Olari Elts serait bien inspiré de nous offrir tout un disque regroupant les poèmes symphoniques de l’entre-deux-guerres : Crépuscule, Aube, Fantômes, Cris dans la nuit, A l’ombre et au soleil, tout comme la Première Symphonie, espèrent sa baguette inspirée.

LE DISQUE DU JOUR

Heino Eller (1887-1970)
Légende symphonique
Concerto pour violon et orchestre en si mineur
Fantaisie pour violon et orchestre en sol mineur
Symphonie No. 2

Baiba Skride, violon
Orchestre Symphonique National d’Estonie
Olari Elts, direction

Un album du label Ondine ODE 1321-2
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Photo à la une : Le compositeur Heino Eller – Photo : © DR