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Plénitude

Voilà, la boucle est bouclée, et dans le sillage de l’année Beethoven le corpus des Sonates pour violon et piano aura connu deux nouvelles intégrales majeures. Le sang neuf apporté par le tandem Lorenzo GattoJulien Libeer aurait-il inspiré le geste si libre Continuer la lecture de Plénitude

Transylvanie

Depuis que le Premier Concerto est sorti de l’oubli, portrait vivant de l’amour de Bartók pour Stefi Geyer, il accompagne souvent au disque le grand concerto-ballade écrit vingt ans plus tard, couplage plus périlleux qu’il n’y paraît : les violonistes sont toujours tentés de tirer le Premier vers le Second, ce dont Benjamin Schmid se garde bien, les distinguant au contraire comme deux mondes antithétiques : la pureté de la grande phrase qui ouvre l’Andante de l’opus posthume est désarmante par sa poésie venue d’un autre temps, alors qu’un ménétrier fait danser l’Allegro plus piquant que giocoso : quel caractère dans cet archet qui fait le vielleux, et comme l’orchestre champêtre persiffle avec lui. Œuvre heureuse, à l’inverse du grand nocturne étrange qui emporte tout le Deuxième Concerto.

Nocturne non pas moderniste comme tant de versions, mais empli de paysages transylvaniens, joués comme une pastorale nostalgique jusqu’à l’amer, avec au centre un Andante tranquillo qui n’est plus une plainte, mais une mélodie toute simple qu’un chevrier pourrait souffler dans sa flûte avant d’esquisser sur les spiccatos une danse narquoise. Benjamin Schmid joue tout le concerto preste, sans s’appesantir, sans effet, cherchant les lignes fluides, les couleurs difractées par un jeu d’archet à la corde, fuyant le style déclamatoire que les virtuoses veulent y mettre, espérant briller à contrario de l’oeuvre.

Il le joue modestement, serrant le texte au plus près, peu soucieux de produire du beau son, fidèle à la manière âpre de quatre interprètes historiques de l’œuvre, Zoltán Székely, Tossy Spivakovsky, Max Rostal et André Gertler et dans le Finale, ardent, acide, fulgurant comme eux, avec le soutien sans cesse sans lourdeur d’un orchestre dirigé vif par Tibor Bogányi qui dirige comme il peindrait les paysages dans lesquels il vit.

Album magnifique, qui saisit la vérité de ces deux œuvres. Schmid serait bien inspiré de nous donner les trois Sonates.

LE DISQUE DU JOUR

Béla Bartók (1881-1945)
Concerto pour violon et orchestre No. 1, Op. posth., Sz. 36
Concerto pour violon et orchestre No. 2, Sz. 112

Benjamin Schmid, piano
Pannon Philharmonic Orchestra
Tibor Bogányi, direction

Un album du label Gramola 2018-07-15
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Photo à la une : © DR