Appassionata

Dès les premières mesures, Ingrid Fliter donne le ton : emporté, tendu, son Concerto de Schumann cherche et trouve une expression dramatique que je n’y avais plus entendue depuis Annie Fischer. Quelque chose de sombre dans la sonorité, mais aussi d’irrésistiblement mobile sans que pourtant jamais le tempo n’en soit changé.

C’est que ce piano sait jouer de tous ses registres, creuse l’espace, chante dans la polyphonie, ce qui ouvre le discours, élargit la focale : non plus strictement un Concerto, mais un poème pour piano et orchestre d’autant que le Scottish Chamber Orchestra suit d’abord la pianiste comme le prouve par défaut l’Ouverture de La Belle Mélusine qui suit : laissé face à Antonio Mendez, les musiciens n’ont plus aucune cohésion, sinon de surface.

Mais peu importe, ce qui fait le prix de l’album, ce sont les Concertos. Si le Schumann est si singulier par sa concentration, le Premier de Mendelssohn l’est tout autant. Très classique de ton, très intériorisé jusque dans le Finale, plus électrisant que seulement allègre, joué à plein clavier. Cette manière me fait penser à celle de Serkin qui y voyait un grand opus romantique et non pas un concerto brillant. Il y a du Weber ici, quelque chose de boisé, l’ensemble est plutôt irrésistible. Je n’en attendais pas moins d’une pianiste qui fait de chacun de ses disques un coup de maître, et refermant cet album sombre, je me dis que les ultimes opus de Brahms lui iraient comme un gant.

LE DISQUE DU JOUR

cober fliter schumann concerto linn
Robert Schumann (1810-1856)
Concerto pour piano en la mineur, Op. 54
Felix Mendelssohn-Bartholdy (1809-1847)
Concerto pour piano No. 1 en sol mineur, Op. 25
La Belle Mélusine – Ouverture, Op. 32

Ingrid Fliter, piano
Scottish Chamber Orchestra
Antonio Mendez, direction

Un album du label Linn Records CKD 555
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Photo à la une : (c) Sussie Ahlburg