Deux Géants

Voilà que Meloclassic publient deux concerts mémorables qui dormaient dans les archives des radios de l’ex-RDA, documentant l’art des deux plus grands chefs russes de la seconde moitié du XXe siècle, Yevgeny Mravinsky et Kirill Kondrachine.

Le premier est évidemment à la tête de son Orchestre Philharmonique de Leningrad lors d’une soirée au Deutsche Staatsoper de Berlin, et dans un répertoire sans surprise, déjà illustré au disque : 33e symphonie de Mozart menée grand train, un rien sèche, mais qui permet d’admirer le jeu si stylé d’un quatuor qui fit la renommée de l’orchestre.

A la fin du concert, une lecture fulgurante de Francesca da Rimini rappelle que Mravinsky dirigeait son Tchaikovski en moderne : âpre, tendu, avec un sens aiguisé de l’attaque pour chaque pupitre. Mais le clou de la soirée reste une lecture tour à tour amère et glaciale du Premier Concerto de Chostakovitch où David Oïstrakh ose dans le Finale un tempo vertigineux. Très différent de la version enregistrée par les mêmes en concert à Prague avec l’Orchestre Philharmonique Tchèque.

Pourtant la vraie surprise vient de l’autre CD qui réunit des extraits de deux concerts donnés par Kirill Kondrachine et la Staatskapelle de Dresde, ajoutant deux opus à sa discographie : la Siegfried-Idyll de Wagner et Ma mère l’Oye de Ravel. La sérénade de Wagner, captée le 9 octobre 1955 à Berlin, documente l’art de Kondrachine alors qu’il n’avait pas encore abandonné la baguette de direction : tempo lent, étude de pianissimo et de gris colorés, réflexion sur les phrasés et les accents, un rien anti-naturel mais fascinant.

Cinq années plus tard, Kondrachine dirige uniquement avec les mains, et la liberté qu’il trouve alors dans la communication avec les pupitres de la Staatskapelle produit une version magique de Ma mère l’Oye, d’un raffinement de timbres, d’une tendresse assez inouïs qui me rappelle ce qu’y faisait Sergiu Celibidache. Et la Sérénade de Tchaikovski ?

Avec son orchestre moscovite, Kondrachine en avait gravé une lecture passionnée. A Dresde, tout est plus tenu, un rien trop classique peut-être, mais la profondeur du quatuor de la Staatskapelle, la beauté du pupitre des altos, et cette nostalgie irrépressible qui s’installe peu à peu vous transporteront.

LE DISQUE DU JOUR

cover Evgeni Mravinski album MeloclassicWolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
Symphonie No. 33 en si bémol majeur, KV 319
Dmitri Chostakovitch (1732-1809)
Concerto pour violon No. 1 en la mineur, Op. 77
Piotr Illitch Tchaikovski (1840-1893)
Francesca da Rimini, fantaisie symphonique d’après Dante, Op. 32

David Oïstrakh, violon
Orchestre Philharmonique de Leningrad
Evgeny Mravinsky , direction
Enregistrements réalisés en 1956

Un album du label Meloclassic MC5000
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cover Kirill Kondrashin meloclassicRichard Wagner (1813-1893)
Siegfried-Idyll
Maurice Ravel (1875-1937)
Ma mère l’Oye
Piotr Illitch Tchaikovski (1840-1893)
Sérénade pour cordes en ut majeur, Op. 48

Staatskapelle de Dresde
Kirill Kondrachine, direction
Enregistrements réalisés en 1955 et 1960

Un album du label Meloclassic MC 5001
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Photo à la une : Le chef d’orchestre Kirill Kondrachine, en 1979 – Photo: © DR