Voces intimae

Pour le Quatuor de maturité de Sibelius, les appelés furent peu nombreux, les élus moins encore. La partition résiste, elle sera ce que le compositeur aura écrit de plus intime et de plus radical avec la 4e Symphonie, et l’ouragan de La Tempête. Le Scherzo est une folie où viennent danser des ménétriers alors que des lemmings courent se jeter dans les lacs, musique inouïe que le quatuor n’entendra pas après elle et n’aura pas entendue avant.

Quels autres compositeurs auront approché cette dimension intime et hallucinée à la fois ? Janáček et Smetana, l’ultime Beethoven dont la cantilène éperdue de l’Adagio di molto semble évoquer les divagations. L’œuvre est saisissante, si singulière, il faut un quatuor comme les Vertavo pour en saisir l’essence sans en gommer les folies, et ce qu’ils font ici, comme jadis pour le Quatuor de Grieg, atteint au génie.

Donc pour le Sibelius, cette version devra vous suffire – oui, vous pouvez même jeter les Budapest, mais pas tout à fait les Fitzwilliam – et pour le Verdi ?
Le couplage est, à première vue, étrange ; l’opus de Sibelius aurait mieux voisiné avec Janáček, mais puisqu’il fallait à ce quatuor « unique » un autre solitaire (même si Sibelius se sera essayé à d’autres Quatuors, un album du Quatuor Sibelius pour Finlandia les documentait), alors pourquoi pas Verdi ?

Rien d’ailleurs n’y ressemble à du Verdi, alors même qu’il l’écrit en même temps qu’Aida et le Requiem. Les Vertavo le jouent plus romantique que charmeur, et un rien fantasque lorsque les donneurs de sérénades paraissent.

Tout grand disque d’un ensemble mythique dont chaque album doit être thésaurisé.

LE DISQUE DU JOUR

Jean Sibelius (1865-1957)
Quatuor à cordes, Op. 56 « Voces intimae »
Giuseppe Verdi (1813-1901)
Quatuor à cordes en mi mineur

Vertavo String Quartet

Un album du label Lawo Classics LWC1201
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Photo à la une : les membres du Quatuor Vertavo – Photo : © DR