Quel feu ! Ceux qui connaissent, et vénèrent à juste titre, la gravure Erato de Bacchus et Ariane par les mêmes, pierre angulaire du cycle Roussel consenti à Erato par le National et Jean Martinon, ne sauront résister à la furia francese qui emporte la Première Suite, supérieure ici par l’urgence et la démesure, puis pas si loin dans la Deuxième Suite des orgies qu’y réglait Charles Munch.
Le concert est d’ailleurs tout entier prodigieux, magnifiquement capté par les ingénieurs de la Maison Ronde, au point que l’acoustique limitée du Théâtre des Champs-Elysées n’amoindrit pas l’ampleur du brasier Roussel, pas plus qu’elle n’émousse l’écriture sévère, magistrale, de la 7e Symphonie de Peter Mennin, dont Martinon assura la création à Chicago, l’enregistrant pour RCA avec ce qui était devenu son orchestre états-unien.
À Paris la lecture sera plus anguleuse, plus minérale aussi, ce qui correspond si bien à l’esthétique de ce compositeur qui ne s’est résigné qu’aux chefs-d’œuvre. Le chef français dût y consacrer l’essentiel des répétitions, ce qui aura eu un effet collatéral bénéfique : le Concerto de Tchaikovski était dans les cordes du National, et évidemment dans celles de Nathan Milstein. Une détente y paraît, elle fait chanter aussi bien le soliste que l’orchestre dans l’Allegro moderato, mais le fuoco ne manquera pas au Finale, avec toujours cette touche de liberté, cette fantaisie improvisée si rare chez le violoniste ukrainien.
LE DISQUE DU JOUR
Peter Mennin (1923-1983)
Symphonie No. 7 « Variation Symphony »
Albert Roussel (1869-1937)
Bacchus et Ariane, Op. 43 – Suites Nos. 1 et 2
Piotr Ilitch Tchaikovski (1840-1893)
Concerto pour violon et orchestre en ré majeur, Op. 35
Nathan Milstein, violon
Orchestre National de l’O.R.T.F.
Jean Martinon, direction
Enregistré au Théâtre des Champs-Elysées, le 4 juin 1969
Un album de 2 CD du label St-Laurent Studio YSL 1708 T
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Photo à la une : le chef d’orchestre Jean Martinon – Photo : © DR