Après Martinů

Jan Novák fut l’enfant terrible de la musique tchèque durant la décennie des années 1960, au point que l’Union des Compositeurs le mit à l’index. Ses œuvres solaires, suractives, où les bons conseils de son professeur et surtout ami, Bohuslav Martinů, furent constamment employés, tournaient le dos aux œuvres sinistres, mortifères d’un Viktor Kalabis et d’un Miloslav Kabeláč. La parenthèse fut brève, et une fois les chars soviétiques entrés à Prague l’exil, au Danemark, en Italie, puis en Allemagne, inévitable. Mais rien ne vint obscurcir sa vibrante palette, comme le prouve le Concentus Biiugis (1977), concerto électrique et rieur pour piano à quatre mains et un orchestre à cordes qui dansent ensemble dans un éblouissant Allegro conclusif.

Rafael Kubelík sera un de ses soutiens fervents durant ses années germaniques, dirigeant souvent ses œuvres – une captation de la cantate Dido a été éditée chez Audite. Tomáš Netopil reprend le flambeau, rendant justice à ce merveilleux compositeur que viennent défendre ses deux filles : Dora Novák-Wilmington, qui a révisé le partition du Concentus Biiugis (on tient là son premier enregistrement mondial dans cette mouture), et Clara Novakova qui prend la flûte dans les rayonnantes Choreae vernales, ces « danses de printemps » nacrées par la harpe, dorées par le célesta, dont le titre latin rappelle que le compositeur aimait à versifier dans la langue de Virgile. A quatre ans de sa disparition, Jan Novák écrit une merveille de poésie lumineuse.

Retour vers le passé (1955) avec le Concerto pour deux pianos, où s’entendent les échos d’un séjour aux États-Unis en compagnie de Bohuslav Martinů, passé à écumer les clubs de jazz. La suractivité explosive de deux Allegros, le ton de romance un peu Hollywood du merveilleux Andante, comment expliquer qu’une telle merveille soit si peu courue. Karel Ančerl la dirigea pour la Radio de Prague (la bande existe), avec le compositeur et son épouse au piano. Leurs nouveaux interprètes en exaltent la verve, jouant cette partition étonnante (le Final avec ses rythmes de danses tchèques est vraiment très Martinů), donnant le sentiment que l’encre est en à peine sèche.

Supraphon poursuivra-t-il la divulgation de l’abondant catalogue légué par Jan Novák ? Il faut l’espérer.

LE DISQUE DU JOUR

Jan Novák (1921-1984)
Concentus biiugis, pour piano à quatre mains et cordes
Choreae vernales, pour flûte, cordes et harpe avec célesta
Concerto pour 2 pianos et orchestre

Dora Novák-Wilmington, piano
Karel Košárek, piano
Clara Novakova, flûte
Orchestre Symphonique de la Radio de Prague
Tomáš Netopil, direction

Un album du label Supraphon SU431-2
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Photo à la une : le compositeur Jan Novák – Photo : © DR