Voici déjà quelques lustres, Charles Owen avait consacré un réjouissant album au piano de Francis Poulenc, délivrant la plus belle lecture (et pour une fois intégrale) des périlleuses Soirées de Nazelles. Le voici qui revient à l’auteur des Dialogues des carmélites, regroupant tout ce qu’il aura écrit pour deux pianistes (sinon le Concerto), à quatre mains, à deux claviers, occasion d’illustrer ce Janus musical. L’Embarquement pour Cythère, l’émouvante Élégie, tombeau pour Marie-Blanche de Polignac, sont du Poulenc en quelque sorte public, musique donnée et qui charme même dans la tristesse.
Mais la Sonate à quatre mains avec ses gamelans et son étrangeté capricieuse, née à la fin de la Grande Guerre et que le compositeur reprendra au début de la Seconde, en ardant les percussions et ne cachant plus l’hommage à Satie du Rustique, surtout la Sonate à deux pianos des années cinquante, si anguleuse, si âpre, son œuvre la plus radicale, montre l’envers d’un art qui osait être moderne sans aucun compromis.
Interprétations superlatives tout comme pour Scaramouche de Milhaud très trompété qui ouvre le disque, ou les raffinements de Ravel retrouvant l’orchestre atmosphérique des Nocturnes de Debussy, programme parfait où l’on ira d’abord à Poulenc, en espérant que Charles Owen reviendra à son œuvre de piano.
LE DISQUE DU JOUR
Darius Milhaud (1892-1974)
Scaramouche, Op. 165b
Francis Poulenc (1899-1963)
Capriccio, FP 155 (d’après
« Le Bal masqué, FP 60 »)
Sonate pour piano à 4 mains, FP 8
Élégie, FP 175
Sonate pour 2 pianos, FP 156
L’embarquement pour Cythère, FP 150
Claude Debussy (1862-1918)
Nocturnes, CD 98 (version pour deux pianos : Maurice Ravel)
Katya Apekisheva, piano
Charles Owen, piano
Un album du label Orchid Classics ORC100270
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Photo à la une : les pianistes Katya Apekisheva et Charles Owen –
Photo : © Sim Canetty-Clarke