Incompréhensible, surtout après l’audition des deux œuvres enregistrées ici : Bruno Walter abandonna la composition en 1910, après avoir mis le point final à sa musique de scène pour l’Œdipe d’Hofmannsthal. Deux Symphonies, une moisson de Lieder admirables que l’on commence à redécouvrir, une Fantaisie symphonique créée par Richard Strauss, et trois partitions de chambre championnées par le Quatuor Rosé et ses amis.
L’audition de l’allègre premier mouvement (justement intitulé « Frisch ») du Quatuor de 1903 suffit à convaincre de la qualité de l’inspiration, et du ton si personnel du giocoso si singulier qu’animent une écriture suractive. La profusion des rythmes et des accents dessinent un univers unique, loin de la Seconde Ecole de Vienne, et même de la lyrique mahlérienne.
Walter a son univers, ce que soulignera plus encore le Quintette de 1905 où l’on imagine qu’il s’est écrit la partie de piano à son intention. Massimo Giuseppe Bianchi est y formidable, se jouant des rythmes complexes, savourant le discours pimenté qui ne peut jamais renoncer à une certaine exubérance heureuse que seul Richard Strauss s’autorisait alors.
Humour, vivacité, tendresse, le tout dans une écriture d’une admirable maîtrise, très viennoise, quel talent gâché, tout cela pour faire un chef d’orchestre ! Je sens déjà que l’on va me maudire, mais je reporte la faute sur le fabuleux Aron Quartett dont j’avais célébré (voir ici) les deux Quintettes de Mario Castelnuovo-Tedesco dans la déjà parfaite compagnie de Massimo Giuseppe Bianchi. Reste à enregistrer le Trio !
LE DISQUE DU JOUR
Bruno Walter (1876-1962)
Quatuor à cordes en ré majeur
Quintette pour piano et cordes en fa dièse mineur
Massimo Giuseppe Bianchi, piano
Aron Quartett, direction
Un album du label CPO 555193-2
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Photo à la une : tableau de Walter Leistikov, Wolkenschatten (1902) – Photo : © akg-images/CPO