La Sonate « recomposée »

Dans le quatrième volume de son intégrale des Sonates pour clavier de Mozart déjà fêtée sur Discophilia (voir ici ma chronique sur les trois premiers volets), Jean Muller place au centre la Sonate en fa majeur et son Andante si singulier.

Sonate hybride – on sait que Mozart ajouta pour Finale un Rondo charmant, mais anecdotique, composé deux années auparavant – mais cet Allegro initial si contrapuntique, et surtout cet Andante, son intervalle de triton, son thème si étrange et si émouvant, quelles pages !, que Jean Muller approfondit, prenant son temps, creusant l’harmonie. Dans son éclairante note d’intention, il avoue penser à la Sonate d’Alban Berg devant ces portées si singulières, cela dit tout d’un pianiste qui, poco a poco, enregistre ce qu’il considère comme l’un des sommets de la littérature pianistique.

Les Sonates de Mozart sont piégeuses, on croit en les lisant et en les jouant qu’on peut les parcourir, mais sous la vêture se dissimule un univers entre Sturm und Drang et Romantisme, univers que le pianiste luxembourgeois exalte au long de la Sonate en ut majeur – après tout, elle date du temps de Mannheim -, vraie symphonie de clavier qu’il anime avec une certain sens du théâtre.

Je ne reviendrai pas sur la simple élégance du jeu, mais il faut souligner la beauté du Steinway fourni et réglé par la Maison Hübner, si lumineusement accordé au propos du pianiste, si idéalement apparié à la délicatesse ambrée, à la nostalgie joueuse de la Sonate en si bémol majeur qui ouvre ce volume.

LE DISQUE DU JOUR

Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
Complete Piano Sonatas,
Vol. 4

Sonate pour clavier No. 7 en
ut majeur, K. 309
Sonate pour clavier No. 13 en si bémol majeur, K. 333
Sonate pour clavier No. 15 en fa majeur, K. 533/494

Jean Muller, piano

Un album du label Hänssler Classic HC22013
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Photo à la une : le pianiste Jean Muller – Photop : © Kaupo Kikkas