Grande voix

Le grave qui ouvre Frühling ne la prend pas de court, et peu l’auront eu à ce point creusé et pourtant plein, sinon Leontyne Price. Est-ce à son grand soprano madré que pense Rachel Willis-Sørensen ? Après06un album où elle illustrait ses rôles d’opéra, essentiellement pris dans le répertoire en langue italienne, de Mozart à Puccini, elle se risque chez Strauss, dont elle n’aura chanté jusqu’à ce jour que la Marschallin je crois bien.

Son allemand impeccable ne l’aide pourtant pas à dessiner absolument le caractère complexe de la comtesse Madeleine, une part de la résignation mélancolique que le personnage exprime dans la scène finale de Capriccio où elle cherche à résoudre le dilemme qui est la raison même de l’existence du livret de Clemens Krauss, lui échappe. Affaire de chant, qui chez elle est droit, et peut-être un peu trop immense pour une soprano lyrique : il lui faudrait plutôt celui d’Hélène d’Egypte !

Mais pour les Vier letzte Lieder, dans le grand orchestre nocturne piqué d’étoiles d’or, un Klimt sonore, dont la revêtent Andris Nelsons et l’orchestre du Gewandhaus de Leipzig, c’est merveille que ce chant droit, et qui ne traine pas, refuse le make-up, se saisit des élans à pleine voix, comme, chacune dans leurs timbres propres, faisaient Leontyne Price ou Sena Jurinac ; cette franchise d’aller d’un pas décidé dans ce crépuscule, il faut l’entendre.

LE DISQUE DU JOUR

Richard Strauss (1864-1949)
Vier letzte Lieder, TrV 296
Capriccio, Op. 85, TrV 179 – Scène finale

Rachel Willis-Sørensen, soprano
Sebastian Pilgrim, basse
Gewandhausorchester Leipzig
Andris Nelsons, direction

Un album du label Sony Classical 19439921722
Acheter l’album sur Amazon.fr – Télécharger ou écouter l’album en haute-définition sur Qobuz.com

Photo à la une : la soprano Rachel Willis-Sørensen – Photo : © Simon Pauly