Derniers feux

Paul Paray aura passé le temps de l’Occupation replié à Monte-Carlo, l’orchestre de la Principauté l’accueillant à bras ouverts. Ils se retrouveront une fois le chef revenu en France, couronné par ses fastueuses années à Detroit, la pléthore de disques publiés par Mercury ayant trouvé leur chemin vers la France avait pu créer définitivement la légende Paray que rappelaient régulièrement ses concerts avec l’Orchestre National de l’O.R.T.F. Chef invité, et uniquement, Jean Martinon ayant engagé l’orchestre dans des contrats l’y associant avec Erato et EMI. Paul Paray voudrait-il revenir à Monte-Carlo pour enregistrer quelques disques ?

La proposition de Concert Hall (sous étiquette Guilde du disque en France) s’assortissait d’une équipe technique garantissant une qualité de captation en rien inférieure à celle dont Paray avait bénéficié avec la team Wilma Cozart et Robert Fine. Paul Paray, octogénaire mais toujours bon pied bon œil n’allait pas renoncer, ni bouder son plaisir.

Le compositeur et chef d’orchestre Paul Paray – Photo : © Bob Martin

En juin 1969, une session entièrement consacrée à Liszt ajoute à une lecture épique des Préludes le démonisme millimétré d’une Méphisto-Valse saisissante, mais aussi la course à l’abime de Mazeppa et l’élégie d’Orpheus, ensemble inattendu dont Paray expose les narrations avec autant de brio que de poésie.

Les autres sessions seront entièrement consacrées au répertoire français, des Bizet alertes, la battue vive du ballet pour les extraits du Cid de Massenet, un Rouet d’Omphale aussi aérien que l’avait voulu Saint-Saëns, la mécanique de L’Apprenti sorcier réglée comme le mouvement d’une horloge infernale, le tout dominé par un merveilleux album Chabrier, España enivrée, Suite pastorale finement détaillée, et par deux Ravel éblouissants, Alborada piquante, Valse vertigineuse, enregistrés en effet dans une stéréophonie luxueuse.

Coda chez Erato pour un disque Lalo couplant une spectaculaire Rapsodie norvégienne débordées de paysages, et la Symphonie espagnole où brille l’archet du jeune Pierre Amoyal, violoniste de première force trop oublié aujourd’hui.

LE DISQUE DU JOUR

The Art of Paul Paray
The Concert Hall/Guilde Recordings

CD 1 – LP Concert Hall 1969
Franz Liszt (1811-1886)
Les Préludes, S. 97
Mephisto Waltz No. 1, S. 110/2 (Der Tanz in der Dorfschenke)
Orpheus, S. 98
Mazeppa, S. 100

CD 2 – LP Concert Hall 1971
Paul Dukas (1865-1935)
L’Apprenti sorcier
Maurice Ravel (1875-1937)
La Valse, M. 72
Emmanuel Chabrier (1841-1894)
España
Suite pastorale

CD 3 – LP Erato 1973
Edouard Lalo (1823-1892)
Rapsodie norvégienne
Symphonie espagnole, Op. 21
Pierre Amoyal, violon

CD 4 – LP VOX/Turnabout 1980
Jules Massenet (1842-1912)
Le Cid, DO 7 – Musique de ballet
Camille Saint-Saëns (1835-1921)
Danse macabre, Op. 40, R. 171
Le Rouet d’Omphale, Op. 31, R. 169

CD 5 – LP Guilde Internationale Du Disque 1976
Georges Bizet (1838-1875)
Carmen Suite No. 1
Carmen Suite No. 2
La jolie fille de Perth – Suite (Scènes bohémiennes), GB 123 (extrait : IV. Danse bohémienne)

Orchestre National de l’Opéra de Monte-Carlo
Paul Paray, direction

Un coffret de 4 CDs du label CD Scribendum SC838
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Photo à la une : le chef d’orchestre Paul Paray – Photo : © DR