Relecture et révélation

Impressionniste le Quatuor de Debussy ? Epurant les lignes, ôtant les sfumatos, jouant les chants et les contre-chants serrés (comme jadis faisaient les Capet, nos amis allemands auraient-ils entendu leurs 78 tours ?), différenciant les timbres de chaque instrument pour faire entendre les éclosions polyphoniques que Debussy produit dans ses crescendos, les Mandelring en font le premier quatuor français moderne, loin des paradis sonores esquissés par les Italiano. Et lorsque le violoncelle de Bernhard Schmidt chante, il le fait sans pathos, comme le violon de son frère. Avec tant de précision, la sensualité n’est pourtant pas absente, mais elle ne déborde pas, reste dans l’ombre du discours.

Le discours lyrique, c’est bien le sujet de l’admirable Premier Quatuor composé par le jeune Jean Rivier (vingt-sept ans) en 1924. Il y cite à la fois Debussy (explicitement dans le premier mouvement) et Ravel (au long du splendide Scherzo). L’œuvre est de bout en bout splendide, rendant plus inexplicable encore que les quatuors modernes l’aient délaissée jusqu’à ce jour.

Donc aux Mandelring merci !, et doublement, car ils nous offrent aussi le lumineux Second Quatuor de 1940, commencé par une pastorale assez Honegger, avant que ne se cristallise un langage autrement âpre dans les deux autres mouvements. Découverte majeure, pour un disque que je ne sais où ranger, à Rivier, à Debussy ?

LE DISQUE DU JOUR

Claude Debussy (1862-1918)
Quatuor à cordes
en sol mineur, Op. 10,
L. 91

Jean Rivier (1896-1987)
Quatuors à cordes No. 1
Quatuors à cordes No. 2
en fa majeur

Mandelring Quartett

Un album du label Audite 97.710
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Photo à la une : les membres du Mandelring Quartett – Photo : © Guido Werner