Nuit et crépuscule

Symphonie ou quatuor ? Les Berg ont fait leur révolution dans les trois Quatuors de Brahms, les jouant amples et burinés, y faisant entrer tout le son d’un orchestre (et la captation des ingénieurs de Teldec les y aidait).

De leurs archets vifs qui précipitent l’Allegro et l’ébarbent d’attaques fulgurantes, les Aris rappellent le temps héroïque du Quatuor de Budapest : même ardeur, même élan, même son ductile et magnifiquement calibré, qui emportera tout le Quatuor en ut mineur dans une chevauchée nocturne effrénée, où se glissent dans les instants de repli comme des souvenirs de Schubert.

C’est magnifique, et jusque dans la Romanze, très dite, dans l’Allegretto pris rapide, et dont les étrangetés harmoniques saisissent par leurs nuances. Le cri qui résonne à l’ouverture de l’Allegro final proclame la couleur dramatique qui rejoint celle de l’Allegro initial.

Après une lecture si ardente et pourtant si sombre, j’espérais en contraste le ton de sérénade du Troisième Quatuor, mais non, après la nuit expressionniste, les Aris préfèrent m’immerger dans le grand crépuscule d’automne du Quintette Op. 115 : couleurs assourdies, phrasés amples, jeu modelé dans d’infinies nuances où la clarinette boa de Thorsten Johanns vient se lover, vrai alto de couleur et de vibration, plus chanteur qu’instrumentiste. L’alliance est magique, mais maintenant il me faut avec ce splendide jeune ensemble les deux autres Quatuors !

LE DISQUE DU JOUR

Johannes Brahms (1833-1897)
Quatuor à cordes No. 1 en ut mineur, Op. 51 No. 1
Quintette pour clarinette et cordes en si mineur, Op. 115

Thorsten Johanns, clarinette
Aris Quartett

Un album du label Genuin GEN20704
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Photo à la une : les membres du Quatuor Aris – Photo : © Sophie Wolter