L’Ancien et le Nouveau monde

On sait Sir Edward Elgar, épuisé par les drames personnels, horrifié par l’apocalypse de la Grande Guerre, devenu muet jusqu’à cet été et cet automne du Sussex où soudain il se penche sur une part délaissée par sa plume : la musique de chambre.

Le Quintette en la mineur, beau comme une promenade mélancolique, embaumé par les souvenirs d’un monde disparu, est un chef-d’œuvre d’une pudeur extrême qu’il faut jouer « de l’intérieur ». C’est peu dire que Garrick Ohlsson, soupesant son piano, y parvient : tempos larges, mais qui chantent, où le quatuor pose ses couleurs. L’œuvre sera mise au net au printemps de 1919 alors que l’éclaircie paraissait. Cette note diffuse d’espoir parcourt la lecture fluide des Takács.

Si Elgar chantait à voix basse l’adieu à un monde disparu, composant avec le Quatuor et le Concerto pour violoncelle, un des chefs-d’œuvre de sa maturité, Amy Beach rêvait de son New Hampshire à l’Ancien Monde.

Son grand Quintette de 1907, s’il hérite de Chadwick sa structure parfaite, se livre à des digressions poétiques qui évoquent le Schubert du Quartettsatz et diffusent une lyrique mélancolique qui sait aller jusqu’au désespoir.

La pure beauté dont les Takács enveloppent l’œuvre, le piano secret, poétique de Garrick Ohlsson, en offrent une version probablement définitive.

LE DISQUE DU JOUR

Amy Beach (1867-1944)
Quintette pour piano et cordes en fa dièse mineur, Op. 67
Sir Edward Elgar (1857-1934)
Quintette pour piano et cordes en la mineur, Op. 84

Garrick Ohlsson, piano
Takács Quartet

Un album du label Hypérion CDA68295
Acheter l’album sur le site du label Hypérion, sur le site www.clicmusique.com, ou sur Amazon.fr

Photo à la une : le pianiste Garrick Ohlsson – Photo : © DR