Le violon du diable

Joseph Szigeti l’avait mise à son répertoire, son archet expressionniste trouvant dans ses ombres, ses détours, sa vocalité, ses prières brèves et ses ruminations moroses quelque chose qui correspondait à une part de son âme. Un enregistrement en subsiste, qu’Ingolf Turban aura certainement entendu, lui qui chante cette sonate dantesque d’un archet si littéraire.

Idéalement, comme pour son Concerto, Busoni entend et compose le violon comme pour une voix, personnage qui dévoile son âme. Ingolf Turban l’entend bien ainsi, jouant les quatorze stations de ce kaléidoscope dans des variations de lumière subtiles, gourmant les formes néo-baroques où s’invitent le souvenir de Vivaldi et Tartini. Le piano d’Ilja Scheps ajoute un cadre formel qui fait contraste jusque dans l’Allegro giocoso.

La Première Sonate n’atteint pas au ton brahmsien, au chant ardent qu’y imprimaient Franco Gulli et son épouse, mais Ingolf Turban et Ilja Scheps auront du moins osé en saisir le caractère ombreux, les formules chevaleresques, l’imaginaire légendaire jusque dans le Finale qui déchaine ses assauts.

LE DISQUE DU JOUR

Ferruccio Busoni (1866-1924)
Sonate pour violon et piano, Op. 29
Sonate pour violon et piano, Op. 36a

Ingolf Turban, violon
Ilja Scheps, piano

Un album du label CPO 555213-2
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Photo à la une : le violoniste Ingolf Turban – Photo : © DR