Mozart et André

André Tchaikowsky avouait préférer par-dessus tout le piano de Mozart. Il le jouait avec une divine simplicité qu’illustrèrent deux disques de sonates et de pièces diverses enregistrés pour la RCA puis à Paris pour La Voix de son maître. Seul devant les micros, il dévoilait un Mozart plutôt sombre, d’une confondante maîtrise stylistique, très personnel de phrasés et d’accents.

Il se vengeait certainement du corset que lui avait imposé Fritz Reiner lors de l’enregistrement assez tendu du 24e Concerto. André Tchaikowsky avait juré que l’on ne le reprendrait plus à jouer Mozart avec le Hongrois (et plus rien d’ailleurs ensuite), mais avec d’autres chefs, il y revint volontiers comme lors de ces deux soirées françaises distantes de dix années.

Son 24e Concerto est d’une élégance folle jusque dans le très sombre, avec un ton assez Don Giovanni qui s’amplifie dans la cadence de l’Allegro signée de sa main (de compositeur). L’intensité de cette lecture amère doit aussi beaucoup à la singularité de la direction de Dimitri Chorafas, grand chef totalement oublié aujourd’hui.

Dix ans plus tard, pour un très orageux Concerto en ré mineur dont Sergiu Comissiona tend les décors, André Tchaikowsky joue avec un détachement souverain, une pudeur, une élégance et un toucher d’une beauté qui me font penser à Wilhelm Kempff : l’évidence même. Soirée bénie des Dieux où le compositeur André Tchaikowsky regarde Mozart droit dans les yeux.

LE DISQUE DU JOUR

Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
Concerto pour piano et orchestre No. 24 en ut mineur, K. 491*
Enregistré le 25 avril 1961

Concerto pour piano et orchestre No. 20 en ré mineur, K. 466
Enregistré le 8 septembre 1971

André Tchaikowsky, piano
Orchestre National de la R. T. F.
*Dimitri Chorafas, direction
Sergiu Comissiona, direction

Un album du label St. Laurent Studio YSL-T801
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Photo à la une : © DR