Théâtre des sentiments

William Christie fut le premier, avec René Jacobs, à nous révéler les beautés de ce répertoire jusque-là négligé : les airs de cour ne paraissaient qu’au compte-gouttes dans certains récitals de contre-ténors, Henri Ledroit les aimait autant que René Jacobs ; s’il avait vécu, il les aurait herborisés d’abondance.

Mais William Christie et ses Arts Florissants, remportèrent la bataille : en avril 1983, ils enregistraient au studio 105 de la Maison de la Radio, tout un album consacré à l’un des maîtres du genre, Michel Lambert.

Trente-trois ans plus tard, après un premier volume qui m’aura échappé, William Christie revient dans ce monde piquant et nostalgique à la fois. Michel Lambert est toujours là – sept Airs, précipitez-vous sur le sublime Vos mépris chaque jour me causent mille alarmes, où revient briller le sensible Cyril Auvity, familier de ce répertoire.

Mais l’angle s’est élargi, on est sorti du strict Air de cour, l’album qui suit le fil rouge des scènes de la Pastoreletta de Marc-Antoine Charpentier, alterne airs sérieux et chansons à boire (l’irrésistible Amis, enivrons nous du vin d’Espagne en France d’Etienne Moulinié) ; et la troupe de chant, brillante et poétique, recourt à la prononciation historiquement informée qui m’insupporte dans la tragédie lyrique mais trouve ici tous ses charmes.

L’album se quitte à regret, le geste élégant de William Christie est partout, il commande qu’il poursuive encore avec ses subtils chanteurs cette anthologie qui ne dit pas son nom.

LE DISQUE DU JOUR

Si vous vouliez un jour …
Airs sérieux et à boire, Vol. 2

Marc-Antoine Charpentier (1643-1704)
Petite Pastorale, Églogue de Bergers, H. 479
Amor vince ogni cosa, H. 492
Tristes déserts, sombre retraite, H. 469
Étienne Moulinié (1599-1699)
Airs à boire pour le retour de Monsieur (extrait : Amis, enivrons-nous du vin d’Espagne)
Enfin la beauté que j’adore
Guillot est mon ami
Michel Lambert (1610-1696)
Airs à une, II, III et IV parties avec la basse continue (extraits : Amour, je me suis plaint, Vos yeux adorables, J’aimerais mieux souffrir la mort, Sans murmurer, Laissez-moi soupirer importune raison, Vous avez trop d’appas, Vos mépris chaque jour me causent mille alarmes)
Sébastien Le Camus (1610?-1677)
Airs, à deux et trois parties (extraits : Ah, que vous êtes heureux !, Laissez durer la nuit, impatiente Aurore)

Les Arts Florissants
William Christie, direction

Un album du label harmonia mundi HAF8905306
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Photo à la une : © Bertrand Pichene/CCR Ambronay