Ultima verba

Ce Concerto est un adieu, Marie-Elisabeth Hecker le sait bien, qui le phrase avec cette nostalgie un peu fière. Elgar le composant veillait son épouse malade : Alice devait mourir alors que l’œuvre n’était pas encore à l’impression.

C’est tout cela qui transparaît dans son interprétation sur la corde, passionnée et pudique pourtant, qui ne se cache pas d’avoir pour modèle les deux enregistrements de Jacqueline du Pré. Cela s’entend pourtant plus par une couleur de sonorité que par le discours, plus allusif, moins empoigné, écoutez l’émotion qui parcourt le fameux jeu luté juste avant le Scherzo fait si vif et impondérable, écoutez surtout l’Adagio, pudique, tenu, secret pour que l’émotion soit plus imparable encore.

Mais pourtant le sommet du disque, après un Sospiri où je crois entendre Janet Baker et non un violoncelle, est le Quintette, chef-d’œuvre absolu d’Elgar où il panse les plaies de la Grande Guerre.

Cette plainte révoltée, où plane les ombres de Schumann et de Dvořák, demande non pas un quatuor et un piano mais quatre artistes de force égale, capables de s’unir dans ce discours complexe, d’en incarner la sombre véhémence, la poésie désolée, les échappées vers des paysages comme vus en songe. C’est ici qu’il faut l’entendre désormais, enfin révélé. Prise de son magnifique, tout grand disque.

LE DISQUE DU JOUR

Sir Edward Elgar (1857-1934)
Concerto pour violoncelle et orchestre en mi mineur, Op. 85
Quintette pour piano et cordes en la mineur, Op. 84
Sospiri, Op. 70

Marie-Elisabeth Hecker, violoncelle
Carolin Widmann, Dacid McCarroll, violons
Pauline Sachse, alto
Martin Helmchen, piano
Antwerp Symphony Orchestra
Edo de Waart, direction

Un album du label Alpha Classics 283
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Photo à la une : la violoncelliste Marie-Elisabeth Hecker – Photo : © DR