Un génie hongrois

La poignée de Sonates de Beethoven enregistrées par Andor Földes pour la Deutsche Grammophon au début de la stéréophonie aura bercé mon enfance, sous étiquette Heliodor ou Résonance.

Réservés au marché allemand, un oncle me ramenait ces disques de ses périples Outre-Rhin, je me souviens encore de cette stupéfaction ressentie à l’écoute de l’Allegro assai qui ouvre l’Appassionata, cette rage, cette éloquence. Puis, le vaste chant de l’Andante s’élevait, sculpté. Ce piano qui va jusqu’au bout du clavier, épuise ses capacités de résonance, cerne les dynamiques, expose tout dans une lumière où le moindre détail de la partition s’entend, mieux ! se voit, le revoici dans ce qui semble être la suite d’une réédition de tout son legs DG entrepris par Cyrus Meher-Homji.

Tout ici va à l’essentiel, les œuvres paraissent dans leur intégrité, suivre Andor Földes partition en main, c’est réaliser à quel point le texte est compris, respecté, intégré à la nature même du jeu fusant et pourtant absolument contrôlé du pianiste hongrois.

Les paysages de la Waldstein sont calligraphiés, même le sfumato y est précis, La Tempête évite toute musique descriptive pour avouer ce qu’elle est, un opus où la psyché, l’humeur, dominent. La Pastorale surprend par son détachement, sa hauteur de vue. Mais un degré supplémentaire est franchi avec l’Opus 101, véritable marbre qu’anime un discours d’une logique imparable jusque dans ses moindres détails, un monument dont les proportions idéales animent également l’Opus 109, dont le Gesangvoll étreint plus par l’émotion que par le sentiment.

Et dire que tout cela était demeuré inédit au CD, contrairement aux deux Concertos republiés en même temps que les Sonates, mais à part : Hungaroton les avait édités sous licence. Les retrouver cette fois dans une qualité de transfert impeccable, avive encore les regrets qu’ensemble Ferdinand Leitner et Andor Földes n’aient pas gravé les trois autres. Mais du moins cet Empereur altier, ce Premier Concerto éperonné, d’accents, de tempo, nous reviennent, dans toute leur gloire.

Demain, Eloquence nous rendra-t-il les Brahms, le disque Liszt (la Sonate !), celui des pièces divers de Beethoven (Variations, Bagatelles). Cela semble plus que probable, en espérant que Warner se souviendra aussi des sublimes Electrola plus tardifs.

LE DISQUE DU JOUR

Ludwig van Beethoven (1770-1827)
Sonate pour piano No. 8
en ut mineur, Op. 13,
« Pathétique »

Sonate pour piano No. 15
en ré majeur, Op. 28,
« Pastorale »

Sonate pour piano No. 17
en ré mineur, Op. 31 No. 2,
« Tempête »

Sonate pour piano No. 21 en ut majeur, Op. 53, « Waldstein »
Sonate pour piano No. 23 en fa mineur, Op. 57, « Appassionata »
Sonate pour piano No. 26 en mi bémol majeur, Op. 81a, « Les adieux »
Sonate pour piano No. 28 en la bémol majeur, Op. 101
Sonate pour piano No. 30 en mi majeur, Op. 109

Andor Földes, piano
Un album de 2 CD du label Deutsche Grammophon 4825854 (Collection « Eloquence Australia »)
Acheter l’album sur le site de la collection Eloquence, sur le site www.ledisquaire.com, ou sur Amazon.fr – Télécharger ou écouter l’album en haute-définition sur Qobuz.com

Ludwig van Beethoven
Sonate pour piano No. 4
en mi bémol majeur, Op. 7

Sonate pour piano No. 6
en fa majeur, Op. 10 No. 2

Sonate pour piano No. 9
en mi majeur, Op. 14 No. 1

Sonate pour piano No. 19
en sol mineur, Op. 49 No. 1

Sonate pour piano No. 31
en la bémol majeur, Op. 110

Sonate pour piano No. 24 en fa dièse majeur, Op. 78
Bagatelle en la mineur, WoO 59, « Für Elise »
6 Bagatelles, Op. 126
Écossaise en mi bémol majeur, WoO 86
Andante favori en fa majeur, WoO 57
32 Variations en ut mineur sur un theme original, WoO 80
2 Rondos, Op. 51
Sonate pour piano No. 25 en sol majeur, Op. 79

Andor Földes, piano
Un album de 2 CD du label Deutsche Grammophon 4827053 (Collection « Eloquence Australia »)
Acheter l’album sur le site de la collection Eloquence ou sur Amazon.fr – Télécharger ou écouter l’album en haute-définition sur Qobuz.com

Ludwig van Beethoven
Concerto pour piano No. 1
en ut majeur, Op. 15

Concerto pour piano No. 5
en mi bémol majeur, Op. 73, “L’Empereur”

Andor Földes, piano
Bamberger Symphoniker
Berliner Philharmoniker
Ferdinand Leitner, direction
Un album de 2 CD du label Deutsche Grammophon 4827048 (Collection « Eloquence Australia »)
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Photo à la une : © Deutsche Grammophon