Le Quintette avec piano que Borodine composa en 1862 – il n’avait pas trente ans – tout entier formé de thèmes populaires russes est très peu couru au disque, injustice que réparent enfin Piers Lane et le Quatuor Goldner. La tendresse qu’ils mettent à cette œuvre, où même la nostalgie – les pages merveilleuses qui ouvrent l’Andante initial, avec leur lumière d’abat-jour, ne s’oublient plus – est bercée d’un bonheur tranquille, va comme un gant à ce Quintette si lyrique.

On y gagne un opus qui mériterait de figurer bien plus souvent au programme des concerts, comme d’ailleurs le magnifique Deuxième Quatuor, guère joué sinon par des formations russes qui en exaltent les saveurs épicés : les Borodine en ont laissé une lecture inoubliable que les Goldner, plus subtilement lyriques, prennent à front renversé. La danse laisse le pas aux rêves, les archets chantent large, convoquant de vrais tableaux sonores, paysages de cordes.

Julian Smiles, le violoncelliste du Quatuor Goldner, et Piers Lane, ajoutent avec bonheur la Sonate de 1860 que Borodine avait écrite à sa propre intention – il était violoncelliste, et des plus brillants parmi les amateurs de Saint-Pétersbourg. Les parties en furent partiellement perdues, mais Mikhaïl Goldstein les compléta, offrant ainsi une partition d’importance au répertoire du violoncelle russe. Avec son petit air à la Bach – le thème fondateur cite le second mouvement de la Première Sonate pour violon du Cantor – et sa lyrique pourtant si romantique, elle trouve dans le jeu subtil des deux amis les meilleurs avocats.

Disque utile, finement mené.

LE DISQUE DU JOUR

Alexandre Borodine (1833-1887)
Quintette pour piano et cordes en ut mineur
Sonate pour violoncelle et piano en si mineur
(compl. Mikhaïl Goldstein)
Quatuor à cordes No. 2
en ré majeur

Piers Lane, piano
Goldner String Quartet
Julian Smiles, violoncelle

Un album du label Hypérion CDA68186
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Photo à la une : © DR