Nouveau visage

Hier, Yundi Li jouait ses Préludes en classique, ton sombre, piano intense et tenu, une seule grande ligne. Admirable de style mais aussi de propos. Aurait-il changé du tout au tout en abordant les Ballades ? C’est certain. Si l’on entend toujours son grand piano, son toucher si affirmé, sa sonorité d’airain, cette fois rien de classique ne paraît ici.

Yundi Li s’attache d’abord à ce que le mot Ballade désigne, un récit épique, des paysages fulgurants. On attendait ce romantisme noir dans les Préludes, véritables lavis de Victor Hugo en musique, le voilà qui paraît justement dans ces Ballades qu’après Samson François et en réaction contre lui, les pianistes ont voulu raisonner, architecture de pure musique. Yundi Li leur rend leur ton de narration, crée d’incroyables paysages durant les transitions, anime tout sans aucune hystérie mais avec un tel à propos, une telle vertu dramatique que j’en reste sans voix.

J’entends déjà certains crier au renoncement, à la trahison. S’ils ne peuvent se faire à l’idée qu’un pianiste d’un tel calibre est absolument libre dans son art, ils se consoleront peut-être avec l’étincelante Berceuse (à laquelle ne manque que le rêve stylisé qu’y distillait Vlado Perlemuter), et plus encore avec les quatre Mazurkas de l’Opus 17, fières et nostalgiques.

Pour EMI, jadis, Yundi Li avait crânement annoncé une intégrale Chopin. La conduira-t-il à son terme avec Deutsche Grammophon ? Je l’espère bien.

LE DISQUE DU JOUR

cover Chopin Yundi LiFrédéric Chopin (1810-1849)
4 Mazurkas, Op. 17
Ballade No. 1 en sol mineur, Op. 23
Ballade No. 2 en fa majeur,
Op. 38

Ballade No. 3 en la bémol majeur, Op. 47
Ballade No. 4 en fa mineur,
Op. 52

Berceuse en ré bémol majeur, Op. 57

Yundi Li, piano

Un album du label Deutsche Grammophon 4812443
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Photo à la une : © DR