Archet de feu

Johanna Martzy, une violoniste pour les violonistes ? Longtemps la poignée de ses albums microsillons ne fut disponible au CD que dans un joli coffret Toshiba Japon. C’est là que j’ai appris son art si intense, ses cantabile audacieux, son violon aux registres si marqués, et dans un microsillon DGFerenc Fricsay l’accompagnait dans le Concerto de Dvořák, en le cambrant dès les accords de l’incipit. Depuis Testament a réédité les EMI, et DG republié dans la grande anthologie symphonique dédiée à Ferenc Fricsay le Dvořák.

cover LP martzy dvorak
La cover du LP Deutsche Grammophon, où la violiniste Johanna Martzy joue le Concerto Op. 53 de Dvořák – Photo : (c) DR

La même œuvre enregistrée pour les micros de la radio deux jours plus tôt ouvre ce double album thésaurisant les enregistrements consentis par la violoniste hongroise à la RIAS de Berlin. Même élan, même sonorité pleine, dans le Finale un rien de liberté en plus, et surtout l’équilibre parfait entre le soliste et l’orchestre : les questions et les réponses à égalité.

Tout le reste de l’album est consacré à la musique de chambre où son accompagnateur de toujours, Jean Antonietti, l’accompagne finement, musicien auquel manque l’audace mais jamais la sensibilité : leur Première Sonate de Brahms est d’un lyrisme contagieux, les pièces baroques plus dites que ciselées, les bis plein de propos avant d’être brillants – la Berceuse sur le nom de Fauré de Ravel ! Mais le sommet reste la Première Sonate de Bach dont les polyphonies s’incarnent par un jeu sur les registres sciant – les basses rugissent, les aigus flutent, ce n’est plus un violon, c’est un orgue !

Hänssler Classic publie juste en même temps les 3e et 4e Concertos de Mozart – enregistrée pour la Radio de Stuttgart, le Troisième en 1956, le Quatrième en 1962. Hans Müller-Kray est au pupitre et une fois de plus sa direction pleine d’autorité me tire l’oreille. Décidément une personnalité !

Sur cet orchestre vivement dessiné, Johanna Martzy chante à pleine voix, aussi magnifique d’engagement dans le Troisième, comme dansé presque, que dans le Quatrième plein d’esprit, d’une virtuosité éblouissante. Ici, elle surpasse de loin les versions qu’elle en avait laissées au studio respectivement pour EMI et DG : écoutez seulement la cadence de l’Allegro du Quatrième Concerto !

LE DISQUE DU JOUR

cover martzy dvorak brahms auditeAntonín Dvořák (1841-1904)
Concerto pour violon et orchestre en la mineur, Op. 53
Johannes Brahms (1833-1897)
Sonate pour violon et piano No. 1 en sol majeur, Op. 78 « Regen-Sonate »
Johann Sebastian Bach (1685-1750)
Sonate pour violon seul No. 1 en sol mineur, BWV 1001
Georg Friedrich Haendel (1685-1759)
Sonate pour violon et basse continue en la majeur, Op. 1 No. 3 HWV 361
Antonio Vivaldi (1678-1741)
Sonate pour violon et basse continue en ré majeur, RV 10
Fritz Kreisler (1875-1962)
Rondino sur un thème de Beethoven
Maurice Ravel (1875-1937)
Berceuse sur le nom de Fauré
etc.

Johanna Martzy, violon
Jean Antonietti, piano
RIAS-Symphonie-Orchester Berlin
Ferenc Fricsay, direction
Un album de 2 CD du label Audite 23424

cover martzy mozart hansslerWolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
Concerto pour violon No. 3 en sol majeur, KV 216
Concerto pour violon No. 3 en ré majeur, KV 218

Johanna Martzy, violon
Radio-Sinfonieorchester Stuttgart des SWR
Hans Müller-Kray, direction

Un album du label Hänssler Classic 94230

Photo à la une : (c) DR