Tout un orchestre

Je l’avoue, depuis la fulgurante intégrale de Cyprien Katsaris pour Teldec enregistrée au long des années quatre-vingt, les Symphonies de Beethoven dans leurs recréations pianistiques par Liszt, avaient quitté ma platine jusqu’à ce que Yury Martynov les revisite sur des pianos historiques.

La couleur, l’élan, la virtuosité et la poésie, tout y était avec en plus des éléments stylistiques dictés par les instruments. A l’Erard choisi pour les Symphonies Nos. 1, 2, 6 et 7, clavier léger et sonore avec sa una corda magique, succède un Blüthner de 1867 qui avait déjà produit ses effets orchestraux dans les Symphonies 3 et 8.

Le revoici pour le doublé des 4 et 5. Dans la Quatrième, le clavier n’est peut-être pas, ça et là, assez agile – surtout si l’on a en tête la version dirigée par Carlos Kleiber – mais Yury Martynov produit dans l’introduction du premier mouvement des effets de sfumato à la beauté étrange. Ces timbres sont incroyables. Avec cela des tempos très Haydn, un sourire global, jusque dans le Finale, solaire.

Mais le grand œuvre de ce nouveau volume c’est la 5e, dont le Finale déploie des arcs-en-ciel stupéfiants lors d’une coda construite avec un art du clavier sciant. Ce piano-orchestre sait aussi chanter avec délicatesse : l’ombre de Schubert passe dans le thème réflexif de l’Andante, et le Scherzo montre à quel point le pianiste sait fouetter les rythmes. Gain considérable par rapport aux intégrales sur piano moderne, on ne regrette jamais l’orchestre, tant le discours intègre la couleur telle une donnée première. Et maintenant, la 9e Symphonie, en espérant que Martynov l’enregistrera sur ce même Blüthner

LE DISQUE DU JOUR

cover beethoven martynov zztLudwig van Beethoven (1770-1827) / Franz Liszt (1811-1886)
Symphonie No. 4 en si bémol majeur, Op. 60
Symphonie No. 5 en ut mineur, Op. 67

Yury Martynov, pianoforte
Instrument: Piano Blüthner, ca.1867

Un album du label Erato Zig-Zag Territoires ZZT356

Photo à la une : (c) 2013 Laurent Becot Ruiz