Une relation discrète

Bernard Haitink a fréquenté par éclipses, du moins au disque, l’œuvre de Richard Strauss. Les grands poèmes symphoniques n’ont pourtant pas manqué à son répertoire – les gravures d’Also sprach Zarathustra et d’Ein Alpensinfonie avec le Concertgebouw, même si elles ne s’imposent immédiatement à l’esprit du straussien chevronné offrent des beautés certaines.

Voici que deux albums paraissent, l’un éditant des concerts avec le London Philharmonic donnés en 1989 et 1992, et l’autre dévoilant une interprétation en public les 13 et 15 décembre 2012 à Munich du Don Quixote avec le violoncelle de Maximilian Hornung et l’alto d’Hermann Menninghaus.

A Londres, un lyrisme irrépressible enflamme Don Juan, conduit avec plus de souplesse que d’accents, laissant se déployer les splendeurs du LPO. Haitink se garde bien de suivre à la lettre les péripéties que Strauss avait en tête, son geste est symphonique, expose la structure parfaite de la partition, en laisse rayonner la splendide vêture orchestrale. Il fait de même avec Ein Heldenleben, évitant toute emphase, au point que même la bataille sonne sans lourdeur : adieux armures, bonjour récit. Avec cela une pointe d’humour durant Des Helden Friedenswerke que je n’y avais pas entendue depuis Beecham ! Le Héros, c’est David Nolan, concertmaster du LPO, plus troubadour que bretteur.

A Munich, avec l’Orchestre de la Radiodiffusion Bavaroise, Bernard Haitink pare les premières mesures du Don Quixote d’une tendresse amusée. Toute l’œuvre aura ce même ton détaché et fantasque à la fois, même dans les épisodes les plus extravertis. Le violoncelle si naturel de Maximilian Hornung est au diapason de cette lecture finement vue, qui refuse l’emphase et trouve le ton narratif voulu par le compositeur. Jamais cet orchestre ne pèse.

Le violoncelliste ajoute, accompagné par Paul Rivinius, la rare Sonate pour violoncelle, œuvre d’un jeune homme de 17 ans, qui regarde vers Brahms et Schumann : à peine du Strauss, mais du bel ouvrage.

LE DISQUE DU JOUR

cover strauss haitink lpoRichard Strauss (1864-1949)
Don Juan, poème symphonique, Op. 20
Ein Heldenleben, poème symphonique, Op. 40*

*David Nolan, violon solo
London Philharmonic Orchestra
Bernard Haitink, direction

Un album du label LPO LPO-0079

cover strauss hornung haitink sonyRichard Strauss (1864-1949)
Don Quixote, poème symphonique, Op. 35
Sonate pour violoncelle et piano en fa majeur, Op. 6

Maximilian Hornung, violoncelle solo
Paul Rivinius, piano (Op. 6)
Orchestre Symphonique de la Radiodiffusion Bavaroise (Symphonieorchester des Bayerischen Rundfunks)
Bernard Haitink, direction
Un album du label Sony Classical 88843047072

Photo à la une : (c) 2013 Luc Jennepin