La vérité sur Elias

Voici bien dix ans, Herbert Blomstedt gravait au Gewandhaus une version enthousiasmante d’Elias, à très grand effectif, illuminé par l’incarnation subtile de Christian Gerhaher, merveille qui prenait le relais de l’ancienne entreprise elle aussi leipzigoise (mais avec les forces de la Radio) de Wolfgang Sawallisch.

Mais Elias, avec ses révérences à Bach et Haendel et son ton biblique, fatalement, fut réclamé par les baroqueux qui en gravèrent des versions historiquement informées, Philippe Herreweghe fut le premier sans que cela produisit la révolution, ni la révélation espérées, d’autres tentèrent l’aventure, mais le seul à l’avoir réussie, reste Paul McCreesh, ressuscitant l’immense effectif assemblé pour les exécutions londoniennes de 1846. Cet Elijah de langue anglaise laissait espérer que l’Allemagne répondrait. Voilà chose faite.

Thomas Hengelbrock retrouve les effectifs (relativement) légers et surtout les couleurs si spécifiques du Balthasar-Neumann-Ensemble, son orchestre rompu à la pratique de l’interprétation historiquement informée, et soudain Elias nous est rendu dans toute sa filiation amoureuse avec Bach, et dans la langue du Cantor, ce qui n’est pas rien.

La ferveur n’en est que plus naturelle, et parfois plus mystérieuse aussi, d’autant que le quatuor de solistes est de toute beauté, l’un des plus rayonnants qu’ait jamais connu l’œuvre, Genia Kühmeier et Ann Hallenberg si parfaitement appariées, de style et de couleurs, le ténor très lyrique de Lothar Odinius, et surtout la basse chantante de Michael Nagy, qui campe le plus impérieux Elias depuis celui qu’inventa George London pour Christoph von Dohnanyi à Cologne en 1962.

Cet Elias si inspiré, si philologiquement et tendrement enlacé par tous, est le complément parfait du miracle produit par Herbert Blomstedt et Christian Gerhaher, comme lui indispensable.

LE DISQUE DU JOUR

Felix Mendelssohn-Bartholdy (1809-1847)
Elias, Op. 70 (version allemande)

Genia Kühmeier, soprano (Die Witwe, Ein Engel)
Ann Hallenberg, mezzo-soprano (Der Engel, Die Köngin)
Lothar Odinius, tenor (Ahab, Obadja)
Michael Nagy, baryton (Elias)
Balthasar-Neumann Chor
Balthasar-Neumann-Ensemble
Thomas Hengelbrock, direction

Un album de 2 CD du label Deutsche Harmonia Mundi 89895362562
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Photo à la une : © DR