Le Graal du Violoncelle

L’unique concerto que Dvořák écrivit pour Hanus Wihan (qui renonça à sa création laquelle fut assurée par Leo Stern) est le Graal des violoncellistes, d’une exigence technique folle mais d’une inspiration absolue, il les contraint à la transcendance.

Marc Coppey n’échappe pas à cette règle, il s’engage dans l’œuvre avec une intensité, une furia, quelque chose de précipité et de quasiment à court de souffle qui dès les premières pages saisit. Cette urgence lyrique, cet appassionato inextinguible sont bien dans le caractère profond du Concerto, mais ils ne s’obtiennent pas sans le concours, au même degré d’engagement, de l’orchestre.

Kirill Karabits et ses Berlinois font feux de tout bois, exaltés, fulgurants, avec un cor qui semble venu des bois de Bohème et dont le vibrato est d’un autre temps, des bois verts qui pimentent le discours, un quatuor léger qui fouette tout cela, soudain je pense que les symphonies leur iraient à la perfection.

Quel panache !, on a beau être à Berlin, pour l’esprit comme pour la lettre, on est bord de la Moldau qui manquait tant à Dvořák lorsqu’il écrivit son concerto aux États-Unis, y pleurant la disparition de son ultime amour, Josefina Kaunikova.

Derrière l’ardeur du discours, Marc Coppey, me rappelant un peu l’archet diseur qu’y déployait récemment le trop méconnu Mario Brunello, sait créer des espaces de repli lyrique où sa sonorité s’assombrit soudain, vertigineux moments de poésie.

L’ensemble est admirable, étreignant, tout comme l’immobilité désarmante de ces bois silencieux qui précédaient le Concerto, pièce magique dont Marc Coppey fait un nocturne lyrique. Le Schelomo qui ouvre le disque, plus méditatif qu’impressionnant, est lui aussi tout à fait abouti dans sa manière de réserve, son éloquence intime, mais je ne peux m’empêcher, après ce Dvořák si flamboyant, de penser que le Concerto de Schumann lui aurait fait un complément autrement idéal.

LE DISQUE DU JOUR

Ernest Bloch (1880-1959)
Schelomo – Rhapsodie hébraïque pour violoncelle et orchestre
Antonín Dvořák (1841-1904)
Klid, Op. 68 No. 5, B. 182
Concerto pour violoncelle et orchestre No. 2 en si mineur, Op. 104

Marc Coppey, violoncelle
Deutsches Symphonie-Orchester Berlin
Kirill Karabits, direction

Un album du label Audite 97734
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Photo à la une : © DR