Quatre minutes : il n’en aura pas fallu plus à Charles Villiers Stanford pour gagner l’empirée des compositeurs, lui qui passa sa vie à se démêler de Brahms puis d’Elgar dans une noria de compositions symphoniques déjà obsolètes alors qu’il les écrivait.

Mais il n’y avait pas que cela. Derrière les labyrinthes de contrepoints, et l’harmonie en armure, derrières les casques des accords et le pratique des formules, la muse subtile de Stanford, tendre, effrayée absolument par ce que devait être un compositeur anglais entre Victoria et George, chantait pourtant.

Elle n’aura jamais mieux donnée de la voix que dans ses « partsongs », cet herbier poétique magique qui permit aux compositeurs d’Albion de couler leurs mots et leurs notes dans la veine fragile et profonde que les madrigalistes élisabéthains avaient initiée. The Blue Bird est un petit miracle dont le sotto voce sublime, et la note finale ouverte sur le mot « blue », atteint à l’intemporalité. Arvo Pärt peut toujours courir, il n’a jamais fait mieux.

Marcus Creed et ses chanteurs du RIAS l’avaient gravé, en vain, c’est ici qu’il paraît, timide, tendre, désarmant, avec ses airs de chanson renaissance figée, de quoi vous faire fondre l’âme à jamais.

Mais tout le disque est du même calibre, signant la tendre perfection à laquelle les voix de Tenebrae sous le geste amoureux de Nigel Short sont parvenues, que ce soit l’Op. 54 d’Elgar, les Shakespeare Songs de Vaughan Williams, ou les étranges modulations du Music, when soft voices die de Frank Bridge. Le secret du cœur de la musique anglaise résonne ici.

LE DISQUE DU JOUR

Music of the Spheres
Part Songs of the British lsles

Œuvres de Charles Villiers Stanford, Edward Elgar, Ralph Vaughan Williams, Frank Bridge, Herbert Murrill, Ernest Walker, Judith Bingham, Jonathan Harvey, Bob Chilcott

Tenebrae
Nigel Short, direction

Un album du label Signum Classics SIGCD 19014
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Photo à la une : © DR