Le Soleil Sempé

Il est quasiment né dans un clavecin et à 12 ans s’est construit son propre clavicorde. Des études au Conservatoire d’Oberlin lui font approfondir sa passion des claviers, orgue y compris. Voilà, c’est entendu, il sera claveciniste. Comme William Christie avant lui, Skip Sempé fait le voyage transatlantique, mais pour parfaire son art auprès de Gustav Leonhardt. Tout comme Pierre Hantaï.

À la fin des années quatre-vingt, la France est devenue la patrie du renouveau de la musique baroque, l’ardent jeune-homme s’établit donc à Paris et fonde Capriccio Stravagante, formation à géométrie variable qu’il dédie aux répertoires français et italiens des 17e et 18e siècles. J’ai encore dans l’oreille le sel, la vitalité mais aussi la subtilité et les élégances qui signent les premiers concerts de cette nouvelle bande. Claveciniste, et animateur, voilà donc ce que sera Skip.

Le disque s’empare du claveciniste et de ses amis quelques années plus tard : deux premiers albums dédiés à Couperin stupéfieront le milieu. Seul au clavecin, où avec ses confrères pour La Sultane et La Superbe, serrant le dialogue avec Jay Bernfeld pour les Suites de viole de gambe : cette autorité, cette profondeur, cette justesse dans les portraits psychologiques, cette énergie contenue par une éloquence altière m’avaient laissé sans voix.

Suivront encore huit albums pour Deutsche Harmonia Mundi, dont deux brillants portraits de Monteverdi en son temps, tout un disque Chambonnières éclatant de caractère, et un autre explorant le clavecin et la viole d’Antoine Forqueray, un Lully coté divertissement, un Purcell longtemps caressé où Howard Crook, passé par l’expérience d’Atys, délivrait Music for a While du souvenir pourtant indélébile laissé par Alfred Deller.

Puis, les regards se portent Outre-Rhin. Un portrait de Buxtehude chambriste ouvre le pas au grand œuvre : tout un disque Bach, enfin. Skip le débute en improvisant sur la Chaconne une sorte de folia incroyable. Deux Concertos le dévoilent décidément poète, mais sa Quatrième Partita, littéralement dite, tutoie le génie de Bach à l’image de Gustav Leonhardt.

Si l’on songe que ces dix albums furent enregistrés en l’espace de trois années, l’admiration fait place à l’étonnement : le bouillonnant printanier de Skip Sempé est tout entier dans cette boîte artistement réalisée, qui reprend les pochettes d’origines, et nous immergent soudain dans la floraison de ce talent demeuré si vivace.

Une sacrée madeleine… !!

LE DISQUE DU JOUR

cover skip sempe edition dhmSkip Sempé
Skip Sempé Edition
Œuvres de Bach, Buxtehude, Chambonnières, Couperin, Forqueray, Lully, Monteverdi, Purcell

Capriccio Stravagante
Skip Sempé, clavecin et direction

Un coffret de 10 CD du label DHM 8875090212
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Photo à la une : © DR