Le son doré

Revoilà les Talich. J’ai hésité longtemps avant de chroniquer ce disque, car j’en ai signé le texte de pochette. Mais impossible de ne pas vous en dire ne serait-ce que deux mots. La nouvelle formation emmenée par Jan Talich revient à Dvořák pour les quatuors en mi bémol majeur et en ut majeur, pas si courus que cela au disque hors intégrale.

Merveille, le mi bémol, si lyrique, si tendre, respire ici avec une poésie entêtante, tout en nuances, et la finesse du jeu fait entendre toute la complexité harmonique que Dvořák met à son quatuor. Sommet, la Dumka, où le son doré des Pragois invite tout un automne.

Mais l’Op. 61, qui se souvient si souvent de Beethoven, n’est pas en reste, incarné avec subtilité, chanté large et intense jusque dans ses ponctuations interrogatives. Et une fois encore le son des quatre amis, beau, rayonnant, tendre, m’émeut, comme à rebours des jeunes ensembles tchèques qui jouent anguleux en croyant être modernes.

Ici Dvořák parle, dans son plus intime certes, mais il nous conduit aussi vers les paysages rêvés qui ont nourri sa veine lyrique si singulière. Bonheur supplémentaire, les Talich sont enfin captés dans la réalité de leur sonorité, souple, élégante, un rien viennoise par cet hédonisme des archets. Le son doré, à l’image de Prague, rien moins.

LE DISQUE DU JOUR

cover talich quartet dvorak la dolce volta
Antonín Dvořák

(1756-1791)
Quatuor à cordes No. 10 en mi bémol majeur, Op. 51 B.92
Quatuor à cordes No. 11 en ut majeur, Op. 61 B.121

Quatuor Talich
Jan Talich, violon (Joseph Gagliano, 1780)
Roman Patočka, violin (origine non identifiée, Italie, ca. 1800)
Vladimír Bukač, alto (Giovanni Battista Guadagnini and Santino Lavazza, 1725)
Petr Prause, violoncelle (Martin Stoss, Vienna, 1821)

Un album du label La Dolce Volta LDV18

Photo à la une : (c) DR