Pas les grands Motets destinés à la Chapelle Royale, ni les petits Motets, bijoux secrets, les premiers comme les seconds sont enregistrés, mais les Motets à quatre parties, qui ne le sont guère, où Charpentier expérimenta au long de sa vie tout un spectre d’émotions porté par les textes sacrés.
L’ajout des deux violons, de la basse de viole, les cordes pincées du théorbe ou du clavecin, l’orgue discret qui colore le fond du tableau sonore, tout cela ajoute à l’intimité du discours, mais Charpentier dans ce repli ne renonce jamais à l’espressivo, ce que Gabriel Rignol et ses amis de La Nébuleuse soulignent avec poésie. Les Motets mariaux sont particulièrement touchants, même lorsqu’ils brillent d’exultation (Regina cæli), mais Charpentier fait aussi entrer le monde contemporain : le ton guerrier de Quare fremuerunt gentes rappelle que le Grand Siècle ne fut pas avare de batailles.
La Nébuleuse saisit avec bonheur la géométrie variable dont use Charpentier d’un motet l’autre et parfois au sein du même, savourant la diversité des climats, les audaces harmoniques savamment masquées qui se nourrissent d’italianismes, les polychromies des parties vocales où le timbre sonore d’Antonin Rondepierre met son soleil, l’ajout de pièces instrumentales signées Du Mont ou Brossard (une magnifique Sonate très ultramontaine) achevant de faire de l’album la reconstitution d’un concert sacré destiné au cadre intime d’un chapelle.
LE DISQUE DU JOUR
Marc-Antoine Charpentier (1643-1704)
Quare fremuerunt gentes
(Motet pendant la guerre),
H. 363
Salve Regina des Jesuites,
H. 27
Nisi Dominus, H. 150
Alma redemptoris Mater,
H. 44
Ave Regina, H. 45
De Profundis, H. 212
Memorare (Prière à la Vierge du Père Bernard), H. 367
Regina cæli, H. 46
Salve Regina, H. 47
Egredimini filiæ Sion, H. 280
Litanies de la Vierge, H. 87
Magnificat, H. 72
Henry Du Mont (1610-1684)
Symphonia – Allemanda
Sébastien de Brossard (1655-1730)
Sonate, SdB 220
La Nébuleuse
Clémence Niclas, soprano – Brice Claviez-Homberg, haute-contre –
Antonin Rondepierre, ténor – Imanol Iraola, basse
Gabriel Rignol, théorbe, direction musicale
Un album du label Musica Ficta MF8040
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Photo à la une : le luthiste, théorbiste et guitariste Gabriel Rignol –
Photo : © Dorine Lepeltier Kovacs