Variations sans variations

Dans le thème de Diabelli, Vestard Shimkus infuse une note d’ironie que peu de pianistes y auront mise : pourtant, dans le noir et blanc du clavier, Beethoven en rit déjà.

Thème prétexte évidemment, à ce dont Beethoven voulait entendre de son piano : ces variations, qui dissimulent le savant sous l’humeur, sont comme des improvisations et surtout quasi fantasia ; Beethoven y tord le cou à la forme par la forme même, pose des bagatelles en face de fugues, des éruptions face aux canons, pour mieux faire disparaître Diabelli convoque Mozart, et le plus comique, Leporello râlant.

Ce défilé de caprices, où s’ébroue un piano si libre, Vestard Shimkus l’entend dans ses moindres détails, s’en régale, sans jamais souligner, faisant les polyphonies fusantes et les coups d’humeur ravageurs.

C’est que Beethoven se libérant autant nous ouvre son atelier sonore : les Diabelli par ellipses, vont aussi loin que les ultimes Bagatelles, les ultimes Sonates, des fragments de comètes y tombent aussi, ce que saisissent la sonorité ample, le brassage harmonique que le pianiste ne craint pas d’assumer, sans que jamais ce cosmos n’oublie son soleil : la sonorité est dorée jusque dans le plus sombre, l’impact du bref s’en trouvant augmenté.

L’écoute se répétera presque comme une gourmandise, de nouveaux détails jaillissant soudain, sans que le fil jamais ne se rompe : c’est le secret de cette vision, qui pour mieux surprendre, fait tenir avec une diabolique virtuosité cérébrale l’alpha dans l’oméga, déjouant le piège de l’anecdotique où tant auront chu.

LE DISQUE DU JOUR

Ludwig van Beethoven (1770-1827)
Variations sur un thème
de Diabelli, Op. 120

Vestard Shimkus, piano

Un album du label Artalinna
ATL-A050

Acheter l’album sur le site www.ledisquaire.com ou sur Amazon.fr ― Télécharger ou écouter l’album en haute-définition sur Qobuz.com

Photo à la une : le pianiste Vestard Shimkus – Photo : © Janis Porietis