On ne pense jamais assez au chœur lorsque l’on songe à Daphnis et Chloé. Même a bocca chiusa il aura, certes dans la marge, entaché quelques versions fameuses. Tenebrae, versé dans l’art des polyphonistes, est un atout majeur pour la lecture d’Antonio Pappano qui préfère penser à une symphonie lyrique plutôt qu’à un ballet, comme pour mieux opposer sa proposition au geste chorégraphique que Pierre Monteux magnifiait avec le même orchestre voici quelques lustres.

Le chef ignore le brio d’estrade, lui préférant la poésie et l’éloquence : la Bacchanale est vertigineuse à force d’érotisme et non de violence, la procession est comme une immense ouverture pour un drame, tout ce qui relève de la pantomime chante avec des allégements, une finesse des timbres, des touches expressives qui ne tiendraient pas dans les pas des danseurs, mais cette magie sonore est simplement fabuleuse, dans l’érotisme des échanges entre Daphnis et Chloé comme dans les voix lointaines qui ouvrent la deuxième partie où l’art de Tenebrae fait entendre toutes les subtilités que Ravel y a notées. Le disque les saisit dans leurs transparences je crois bien pour la première fois.

Ceux qui n’attendaient pas Antonio Pappano ici devront venir se surprendre en bien. En cette année Ravel il serait triste que le chef anglais en reste là !

LE DISQUE DU JOUR

Maurice Ravel (1875-1937)
Daphnis et Chloé, M. 57

Tenebrae
London Symphony
Orchestra
Sir Antonio Pappano, direction

Un album du label LSO Live 0899
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Photo à la une : le chef d’orchestre Sir Antonio Pappano –
Photo : © Musacchio Ianniello Pasqualini