Dans sa brève note d’intention, Sir John Eliot Gardiner loue la flexibilité des musiciens du Concertgebouw. On l’entend à l’œuvre. Le fini des phrasés, le nuancier, la précision des rythmes, jusqu’à cette agogique qui efface les barres de mesure, disent assez que les Néerlandais se fondent dans le geste du chef anglais.
Dix-huit ans après l’atelier à ciel ouvert de son parcours Brahms avec l’Orchestre Révolutionnaire et Romantique, Gardiner ne revient pas ici pour doublonner. La rencontre tient de la pure magie, transparence et fulgurance, pure beauté des timbres, et ce drive qui dès la timbale preste qui ouvre le cycle, indiquent qu’ici on ne traînera pas, même pour la pastorale de la Deuxième dont l’énergie du Finale rappelle le geste de Karel Ančerl à Prague.
L’allégement de l’ensemble ne vise pas à amincir l’univers Brahms, il lui infuse une lumière qui irradie les polyphonies – la Quatrième est simplement fabuleuse – et expose toute la modernité, l’élan vers de nouveaux mondes sonores que Schönberg sut y débusquer. Pourtant les audaces de cette nouvelle syntaxe sont comme guipées dans une gangue de classicisme ; l’absence de pathos suffirait à l’expliquer si en sus les rythmes inextinguibles n’invitaient parfois une sève quasi bohémienne. L’ombre de Dvořák peut-être, qui ferait le second sujet idéal de cet alliage parfait, d’autant que la discographie du chef anglais reste de ce côté-ci plutôt courte.
LE DISQUE DU JOUR
Johannes Brahms
(1833-1897)
Symphonie No. 1 en ut mineur, Op. 68
Symphonie No. 2 en ré majeur, Op. 73
Symphonie No. 3 en fa majeur, Op. 90
Symphonie No. 4 en mi mineur, Op. 98
Royal Concertgebouw Orchestra
Sir John Eliot Gardiner, direction
Un album de 3 CD du label Deutsche Grammophon 4863519
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Photo à la une : le chef d’orchestre Sir John Eliot Gardiner –
Photo : © Hans van der Woerd